Engluée dans une crise financière aigüe qui affecte les finances publiques, les dirigeants égyptiens avaient annoncé, en février 2022, la cessions de participations de l’Etat dans 32 entreprises publiques via le marché boursier et/ou par cessions directs à des investisseurs stratégiques.
Les premières cessions via la Bourse du Caire ont démarré en mars dernier et ont permis, jusqu’à présent, la privatisation de 14 entreprises publiques. Ces cessions ont permis à l’Etat d’engranger 5,6 milliards de dollars de recettes.
A travers ces opérations, l’Egypte vise plusieurs objectifs. D’abord, faire face à la crise financière en renflouant les caisses de l’Etat via les cessions de participations étatiques dans de grandes entreprises publiques. Ce qui devrait améliorer l’état des finances de l’Etat dans une conjoncture marquée par des besoins de financement colossaux du budget au titre de l’exercice 2023-2024 (l’année fiscale va du 1er juillet 2023 au 30 juin 2024).
Ainsi, ces opérations vont financer le budget de l’Etat et relancer une croissance ralentie par une conjoncture économique internationale difficile au cours de ces dernières années (Covid-19, guerre Russie-Ukraine…).
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Ensuite, avec ces privatisations, l’objectif est d’arriver à une plus grande efficacité dans la gestion des entreprises publiques dont nombreuses souffrent d’une gestion manquant d’efficience avec souvent des effectifs pléthoriques. La gestion par le privé de ces entreprises sera plus efficiente en privilégianr la rentabilité des investissements. Cela permettra de réduire les dépenses publiques affectées aux entreprises étatiques déficitaires. L’objectif de l’Etat à travers ses privatisations est de faire passer la part du secteur privé dans l’économie à 65% en 2025 contre 30% en 2021.
A travers ces désengagements au profit du secteur privé, l’Egypte répond à une des exigences du Fonds monétaire international (FMI) en contrepartie d’un prêt de 3 milliards de dollars sur 46 mois, approuvé par l’institution en décembre 2022. Un volume de prêt que le pays souhaite augmenter actuellement pour faire face à ses importants besoins de financement.
Enfin, ces privatisations, réalisées via la Bourse du Caire, vont également contribuer à redynamiser la place cairote, la seconde place boursière du continent en augmentant le nombre de société cotées, sa liquidité et sa capitalisation. Ce qui va certainement contribuer à l’attractivité de la Bourse égyptienne.
Et ces opérations de privatisation devraient se poursuivre. En effet, le gouvernement égyptien en collaboration avec la Société financière internationale (SFI), filiale de la Banque mondiale dédiée au secteur privé, étudient la possibilité d’allonger la liste des entreprises à privatiser à 50 autres entités publiques, toujours via la Bourse du Caire. Ces opérations devront concerner des secteurs clés de l’économie égyptienne comme les banques et assurances, les télécommunications et la gestion de l’exploitation des aéroports publics.
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Selon les prévisions, les privatisations devraient générer 10 milliards de dollars en moyenne par an sur la période 2022-2025, soit un total de 40 milliards de dollars de recettes. Ce qui permet de soulager les finances publiques égyptiennes mal-en-point ces dernières années.
A noter que ces désengagements de l’Etat concernent plusieurs secteurs: automobile, centres de données, réseaux de distribution du pétrole et du gaz, unités de liquéfaction de gaz, centrale d’énergie renouvelable, banques et assurances, télécommunication, engrais,… Si certaines de ces entreprises appartiennent à l’Etat, d’autres sont jusqu’à présent sous le contrôle de l’armée.
Enfin, ces opérations de privatisation constituent une aubaine pour les pays du Golfe et leurs fonds souverains aux ressources considérables. D’ailleurs, certains de ces fonds ont entamé leurs acquisitions l’année dernière profitant de la dévaluation de la livre égyptienne qui a perdu plus de la moitié de sa valeur vis-à-vis du dollar, rendant les actifs beaucoup plus attrayants, et les assouplissements légaux concédés par le gouvernement égyptien pour attirer les investisseurs étrangers.
Des opportunités qui n’ont pas échappé au Fonds public d’investissement saoudien et à la holding ADQ d’Abou Dhabi qui ont acquis de nombreuses participations dans des entreprises cotées à la Bourse du Caire. Ainsi, ces deux acteurs du Golfe détiennent désormais 41,5% de Abou Qir fertilizer Company et 45% de Mopcio, les deux plus grands producteurs d’engrais d’Egypte.
Une aubaine pour ces deux acteurs qui bénéficient d’une conjoncture sectorielle favorable avec la flambée des cours des engrais. La holding ADQ est aussi le premier actionnaire privé de Commercial international bank (CIB), la plus grande banque privée égyptienne avec une participation de 17,5%, alors que le fonds saoudien détient 25% de l’entreprise publique égyptienne e-finance.