Maraîchage Vs urbanisme: à Conakry, c’est le pot de terre contre le pot de ciment

Une maraichère dans son champ à Conakry

Le 09/11/2023 à 11h35

VidéoSitués derrière la deuxième plus grande université du pays, des lopins de terre encore exploités par des maraîchers attisent la convoitise de promoteurs immobiliers. Des chantiers sortent de terre en lieu et place du manioc et de l’aubergine.

Certains cultivateurs sont là depuis toujours. Sous la pluie ou le soleil, ils cultivent patate, aubergine et parfois même du riz... en ville, au cœur du quartier Sonfonia.

Sauf que depuis peu, les légumes ne sortent plus de terre, mais des bâtiments et des infrastructures s’élèvent vers le ciel. Une cohabitation difficile si non impossible.

Sadiba Kourouma rizicultrice confie: «Les gens viennent maintenant jusqu’à chez nous, ils veulent nous bloquer. Comme ce sont eux les puissants, ils font ce qu’ils veulent». Eux, ce sont les promoteurs immobiliers accusés de concurrence déloyale. Le pot de terre contre le pot de béton.

Le principal problème est posé par la nouvelle route qui complique les travaux d’irrigation «à cause de la route, l’eau ne peut plus se déverser de l’autre côté. Parce que lorsque tu plantes du riz, il est préférable de ne pas inonder le champ» lâche Sadiba.

Et pourtant, sur cet espace fertile, les récoltes étaient abondantes, les cultivateurs heureux. Des centaines de sacs de riz étaient récoltés.

Pour ces femmes cultivatrices, le travail est encore plus difficile. Pourtant, ces lopins de terre sont leur gagne-pain, garant de leur survie. La formule est simple: il faut travailler pour manger, professe Jeannette Millimono «Les enfants terminent les études, mais se retrouvent sans travail».

«Nous ne pouvons pas rester à la maison même quand nous sommes malades. Nous travaillons pour vivre. Tout ce que nous mangeons, c’est ce que nous cultivons, feuilles de patate et manioc principalement». A cela, il faut ajouter le problème de l’eau.

Malgré tout, il n’est pas question pour ces paysans de quitter la ville et se retrancher en périphérie. Cela supposerait plusieurs autres frais à supporter comme le transport des produits vers les marchés, l’eau à trouver... Cela ferait trop de dépenses pour une activité qui ne rapporte quasiment rien. Une seule option s’offre à ces femmes, rester sur place car c’est ici que leur vie est possible.

Par Mamadou Mouctar Souaré (Conakry, correspondance)
Le 09/11/2023 à 11h35