Pyramide de Ponzy: le Gabon à l’épreuve des escrocs à col blanc

Le 21/01/2023 à 08h56

VidéoDe l’affaire Br Sarl qui a laissé 18.000 épargnants sur le carreau en 2015, au dossier du programme d’investissement «JDS Partners» de l’entreprise JDS qui a floué, sept ans plus tard, plus de 10.000 clients, s’joutent des milliers d’autres usagers victimes, depuis ce début d’année, d’une nouvelle escroquerie en bande organisée à Libreville.

L’enquête menée par un journaliste local a permis de faire plier une structure d’épargne privée opérant au Gabon sous une identité usurpée de d’une entreprise légale basée en Europe.

L’affaire Sonnedix au cœur d’une récente duperie à Libreville révèle que le Gabon, comme tant d’autres pays du continent africain, est confronté au problème de la mobilisation de l’épargne intérieure. Cette situation fait donc le lit des épargnes informelles, qui connaissent des fortunes diverses. Certains doutent d’ailleurs de leur efficacité, tirant une mauvaise expérience des tontines, les association collectives d’épargne.

«Dans les tontines, lorsque vous donnez 10.000 Francs Cfa vous en recevez, au bout de dix mois, 100.000. Lorsque vous recevez ces 100.000 Francs Cfa vous faites encore des dépenses pour recevoir les membres du groupe de tontine. Donc, vous ne gagnez pas. Vous perdez toujours. Or dans une banque ces 10.000 Francs Cfa en dix mois peuvent vous procurer des taux d’intérêt supplémentaires» estime Morgane Ekome, un travailleur indépendant.

Pour limiter les risques d’une arnaque à l’épargne, Yonnel a fait le choix de la thésaurisation. Une méthode vieille comme le monde qui consiste à garder l’argent liquide chez soi, au lieu de le placer.

«A chaque fin de mois, dès que je prends mon argent je le dépose à la maison. C’est pour éviter les arnaques» dit ce jeune fonctionnaire de l’Etat Gabonais.

La thésaurisation, est-ce un réflexe salutaire, une fausse bonne idée ou alors une précaution risquée ? Dans tous les cas, le dernier scandale financier né de l’affaire Sonnedix à Libreville pourrait bien donner raison à Yonnel. Car en décembre 2022, cet établissement de placement de capitaux s’est aligné sur le tristement célèbre régistre des arnaques pyramidales qui secouent le Gabon depuis une décennie.

Intrigué par cette trop grande facilité d’investissement, Boursier Tchibinda, journaliste, a tenté d’en savoir plus en se rapprochant de l’entreprise «mère» fondée en 2009. La réponse du producteur mondial indépendant d’énergie solaire est sans équivoque : «Actuellement, Sonnedix n’a pas d’opérations ni de partenariats en Afrique (…) Nous n’y soutenons aucun intermédiaire.»

D’ailleurs, sur son compte Twitter qu’elle présente comme son «seul canal de communication officiel», l’entreprise ajoute à l’intention des internautes gabonais : «Veuillez garder à l’esprit que Sonnedix ne vous demandera jamais votre argent ou vos informations personnelles.»

La demande en produits de placement plus rentables qu’une épargne classique en banque est tellement forte que les épargnants, des particuliers pour la plupart, sont naïvement tombés dans le piège de ces sociétés malhonnêtes.

Le cas de Bar Sarl, dont les promoteurs sont portés disparus depuis 2015 en emportant plus de 70 milliards de francs Cfa de 18.000 épargnants, reste pourtant sans suite judiciaire.

«Depuis la cessation d’activité de BR Sarl en octobre 2015, les épargnants n’ont cessé de rappeler l’État gabonais à ses responsabilités, estimant qu’il est le principal responsable de la situation dans laquelle ils se trouvent depuis plus de cinq ans» explique Emmanuel Mvé Mba, responsable des épargnants victimes de BR Sarl.

Dans les faits, aucun investissement générateur de revenus n’est effectué dans les différents cas : pour créer et maintenir l’illusion de rentabilité, c’est l’argent des derniers entrants qui est redistribué aux précédents, après que le promoteur a ponctionné sa part. Pour la fédération des associations professionnelles des établissements de microfinance de l’Afrique centrale, l’heure est à la plus grande vigilance face à ces méthodes d’arnaque bien huilés.

«Nous ne gérons que les établissements agréés...Nous pouvons les dénoncer. C’est pour cela que nous faisons les communiqués. Aujourd’hui, nous menons des campagnes de sensibilisation parce que nous avons la responsabilité pédagogique, mais pas celle de gendarme» martèle, Jean Robert Obiang Obiang, Président de la FAPEMAC.

Par Ismael Obiang Nze (Libreville, correspondance)
Le 21/01/2023 à 08h56