Sahel: les recettes du général Clément-Bollée contre le terrorisme

Le général d’armée Bruno Clément-Bollée, ancien directeur de la coopération en matière de sécurité et de défense au ministère français des Affaires étrangères

Le général d’armée Bruno Clément-Bollée, ancien directeur de la coopération en matière de sécurité et de défense au ministère français des Affaires étrangères. DR

Le 15/11/2018 à 08h15, mis à jour le 15/11/2018 à 08h18

Le général de division Bruno Clément-Bollée, ancien directeur de la coopération en matière de défense et sécurité au ministère français des Affaires étrangères, livre ses recettes contre le terrorisme.

Rencontré en marge du forum sur la paix et la sécurité, organisé à Dakar début novembre, le général d’armée Bruno Clément-Bollée, ancien directeur de la coopération en matière de sécurité et de défense au ministère français des affaires étrangères, livre ses recettes pour combattre le terrorisme en Afrique, à travers un long entretien accordé mardi par le site d’informations en ligne sénégalais «Seneweb.com».

Parlant des enjeux, l’officier supérieur relève que la sécurité est un concept global car «tous les défis sont liés. Quand les conditions pour recruter les terroristes sont réunies, c'est-à-dire la misère, le sentiment d’abandon, la désespérance, il est facile d’endoctriner les jeunes. Il y a aussi d’autres défis tels que le trafic de drogue, le trafic d’êtres humains, l’immigration illégale qui est organisée par des passeurs,... Mais pourquoi ce magma prolifère chaque jour? Parce que, justement, il y a une mal organisation, une anarchie et tout le monde en profite. Il y a aussi des gens qui profitent du système pour défendre une cause, alors qu’en réalité c’est pour protéger leur trafic».

Parmi les causes identifiées comme favorable à une prolifération du terrorisme et de l’insécurité dans la région du Sahel, le spécialiste français évoque également les conditions géographiques, surtout «la grandeur de la région du G5 Sahel, zone vaste comme l’Europe, alors que les forces de Barkhane et du G5 Sahel réunies ne font que 10.000 hommes au total. En tant qu’expert et homme de terrain, on voit nettement qu’il est ridicule de prétendre couvrir une étendue aussi vaste avec un tel contingent de militaires. Pourtant, ces forces sur le terrain font un excellent travail grâce à une coopération très organisée en matière d’échanges de renseignements, de transport stratégique,...».

Pour la réponse face à tous ces défis, sans prétendre donner de leçons aux chefs d’Etat, qui sont parfaitement conscients de ce qu’il faut faire, le général de division Bruno Clément-Bollée préconise «un dialogue étroit et permanent à plusieurs niveaux (Etats, forces armées et de sécurité, la définition d’intérêts communs, etc.). Le dialogue est central dans cette affaire pour que chacun des acteurs comprenne bien l’importance des enjeux et des défis auxquels il faut répondre».

Dans la conception du général de division Bollée, Barkhane et la force du G5 Sahel ont pour tâche d'«arrêter l’hémorragie terroriste». Maintenant, pour guérir le malade il faut aller au-delà de l’action purement militaire.

Restaurer la sécurité au Sahel apparait comme un énorme défi

Un challenge pour lequel un autre expert, également présent au forum de Dakar, préconise «la reconstruction d’un appareil d’Etat sérieux, efficace, qui suppose en priorité la recomposition d’armées multiethniques soumises au pouvoir civil, des forces de police et de gendarmerie bien formées et bien équipées, respectueuses des droits de l’homme, la mise en place d’une administration territoriale compétente, disposant d’un minimum de moyens financiers d’intervention, et enfin d’un système judiciaire non corrompu, capable de répondre aux besoins de justice dans tout le pays et pas seulement au niveau de la capitale».

Par Cheikh Sidya (Nouakchott, correspondance)
Le 15/11/2018 à 08h15, mis à jour le 15/11/2018 à 08h18