Il n’est désormais plus possible au gouvernement nigérien de se réfugier derrière des éléments de langage édulcorants la réalité des faits graves actuellement en cours dans le pays. En effet, le général de division Sidikou Issa, chef d’état-major de l’armée (CEMA) nigérienne, a affirmé « souscrire à la déclaration » des putschistes. Cette adhésion de la plus haute autorité militaire du pays met fin aux doutes qui subsistaient encore jusqu’à ce matin du jeudi 27 juillet 2023 au lendemain du coup d’Etat perpétré mercredi.
Le CEMA nigérien, nommé en avril dernier, explique vouloir « éviter une confrontation meurtrière entre les différentes forces ».
Car la présidence et le gouvernement continuaient de nier l’évidence.
En effet, le président nigérien Mohamed Bazoum a rejeté jeudi ce coup d’Etat, son bras droit assurant que le régime actuel représente les « autorités légitimes » et appelant les officiers « factieux » au dialogue.
Après le Mali et le Burkina Faso, le Niger, jusqu’alors allié des pays occidentaux, devient le troisième pays du Sahel miné par les attaques de groupes liés à l’Etat islamique et à Al-Qaïda, à connaître un coup d’Etat depuis 2020.
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« Les acquis obtenus de haute lutte seront sauvegardés. Tous les Nigériens épris de démocratie et de liberté y veilleront », a déclaré M. Bazoum dans un message publié jeudi matin sur Twitter, rebaptisé X, quelques heures après que des militaires ont annoncé sur la télévision nationale l’avoir renversé.
« Nous sommes les autorités légitimes et légales », a de son côté déclaré sur France 24 Hamoudi Massoudou, chef de la diplomatie nigérienne et chef du gouvernement par intérim en l’absence du Premier ministre qui était en déplacement au moment du putsch.
« Il y a eu une tentative de coup d’Etat », mais « ce n’est pas la totalité de l’armée qui a engagé ce coup d’Etat », a assuré M. Massoudou depuis Niamey. « Nous demandons à ces officiers factieux de rentrer dans les rangs. Tout peut s’obtenir par le dialogue mais il faut que les institutions de la République fonctionnent », a-t-il poursuivi.
Il a également lancé « un appel à l’ensemble des patriotes et démocrates nigériens pour qu’ils se lèvent comme un seul homme pour dire non à cette action factieuse qui tend à nous ramener 10 ans en arrière et à bloquer les progrès de notre pays ».
Soumises à de fortes pluies, les rues de Niamey étaient quasiment désertes jeudi matin, a constaté un journaliste de l’AFP.
Des militaires putschistes ont annoncé mercredi soir à la télévision nationale avoir renversé le président démocratiquement élu Mohamed Bazoum, au pouvoir depuis 2021.
« Nous, Forces de défense et de sécurité (FDS), réunis au sein du Conseil national pour la sauvegarde de la patrie (CNSP), avons décidé de mettre fin au régime que vous connaissez », celui du président Bazoum, a déclaré le colonel-major Amadou Abdramane, entouré de neuf autres militaires en tenue. « Cela fait suite à la dégradation continue de la situation sécuritaire, la mauvaise gouvernance économique et sociale », a-t-il ajouté.
Il a affirmé vouloir respecter « l’intégrité physique et morale des autorités déchues ». Le président Bazoum et sa famille « se portent bien », selon une source proche de la présidence nigérienne.
- Frontières fermées et couvre-feu -
La junte, qui rassemble tous les corps de l’armée, de la gendarmerie et de la police, a suspendu les institutions, fermé les frontières terrestres et aériennes, instauré un couvre-feu de 22H00 à 05H00 (21H00 à 04H00 GMT).
Cette annonce est intervenue à l’issue d’une journée de tensions mercredi à Niamey, marquée par ce que le régime avait appelé « un mouvement d’humeur » de la garde présidentielle qui retient le président Bazoum dans sa résidence officielle.
Des pourparlers entre M. Bazoum et la garde présidentielle pour tenter de trouver une solution, sans que l’on sache quelles étaient les exigences des militaires, ont échoué.
Avant l’annonce du putsch, une médiation ouest-africaine devait tenter jeudi de trouver une solution à ce qui n’était encore qu’une tentative de coup d’Etat en cours, dénoncée par l’ensemble des partenaires du Niger.
Le putsch annoncé a été vivement condamné par tous les partenaires du Niger et le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres.
Le secrétaire d’Etat américain Antony Blinken a dit avoir pu parler avec M. Bazoum mercredi pour lui assurer « clairement que les États-Unis le soutenaient résolument en tant que président démocratiquement élu du Niger », exigeant sa libération immédiate.
La France a condamné « toute tentative de prise de pouvoir par la force » au Niger, ainsi que l’Allemagne qui a appelé à « libérer immédiatement le président démocratiquement élu " et demandé à l’armée « de retourner dans ses casernes ».
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Le Niger est l’un des derniers alliés des pays occidentaux dans une région du Sahel ravagée par la violence jihadiste et dont deux voisins, le Mali et le Burkina Faso, dirigés par des militaires putschistes, se sont tournés vers d’autres partenaires, dont la Russie.
C’est en particulier un partenaire privilégié de la France dans le Sahel qui y a déployé 1.500 soldats.
L’histoire du Niger est jalonnée de coups d’Etat: depuis l’indépendance de cette ex-colonie française en 1960, il y en a eu quatre, le premier en avril 1974 contre le président Diori Hamani, le dernier en février 2010 qui a renversé le président Mamadou Tandja. Sans compter les tentatives de putsch, nombreuses.
En avril 2022, Ousmane Cissé, ancien ministre nigérien de l’Intérieur d’un régime de transition militaire (2010-2011), avait été écroué pour son implication présumée dans un putsch raté en 2021.
En février, il a été relaxé faute de preuves, mais cinq des militaires présentés comme les principaux meneurs de la tentative de putsch de 2021, ont été condamnés à 20 ans de prison.