Au sujet des actuelles difficultés budgétaires que traverse l'Etat du Sénégal, Amadou Ba, ministre de l’Economie, des finances et du plan, peine à convaincre. Le député et candidat à la prochaine présidentielle, Mamadou Lamine Diallo, vient d’envoyer une demande d’explication au gouvernement pour qu’il publie de manière détaillée comment ces 1800 milliards de Fcfa ont été dépensés.
«En vérité, le gouvernement ne peut plus faire face aux dépenses engagées et ordonnancées, il accumule des arriérés concernant la dette intérieure (qui est un) cancer de notre économie», a fait savoir ce député de l’opposition.
Au parlement, dans sa question économique quotidienne, Mamadou Lamine Diallo révèle aussi que «la plupart de nos entreprises de BTP sénégalaises ont des marchés avec l’Etat. Ce sont elles qui subissent de plein fouet la crise financière du Trésor. Beaucoup vont être en cessation d'activité ou (devoir) licencier». Et le député d'imputer la responsabilité de ces manquements au chef de l’Etat sénégalais, Macky Sall.
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«C’est la faute à Macky Sall qui ignore tout de la gestion macroéconomique d’un pays qui n’a pas d’influence sur les prix mondiaux (price maker)", a-t-il affirmé, avant de préciser que «cette année 2018, le gouvernement n’est pas allé sur le marché régional de l’Uemoa pour des bons du trésor ou des obligations». En lieu et place, le Gouvernement a pu collecter de l’argent grâce aux Eurobonds.
Mais selon Mamadou Lamine Diallo, la question qu’il faudrait maintenant se poser est de savoir ce que le gouvernement a «fait de l’argent des Eurobonds en ce moment précis où le ministre de l’Economie et des Finances, acculé, passe aux aveux sur la crise financière de l’Etat».
Ne s'arrêtant pas là, ce député est également revenu sur la gestion des contrats liés à la récente découverte de pétrole, de gaz naturel et de mines de fer au Sénégal.
Citant les chiffres publiés par un groupe de travail dirigé par l’ex-président de la république sud-africaine, qui révèlent qu’une «partie importante des 60 milliards de dollars de flux financier qui quittent l’Afrique provenait du secteur du pétrole et des mines», Mamadou Lamine Diallo estime que le gouvernement a le devoir de discuter de la question des ressources naturelles avec les représentants du peuple.
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«Le mécanisme mis en place est assez complexe. Il y a l’expérience décrite en Afrique concernant les bateaux fantômes qui exportent le pétrole sans trace comptable (et) dont le produit des ventes se retrouve dans les comptes des chefs politiques africains».
«C’est dire qu’il y a des clauses secrètes qui soit affectent des barils de pétrole ou des milliers de m3 de gaz naturel aux chefs politiques, soit donnent pour chaque baril ou chaque millier de m3 de gaz vendu des dollars aux chefs politiques. Ces clauses ne figurent pas dans les contrats publiés par les gouvernements», a-t-il dénoncé.
Selon Mamadou Lamine Diallo, la nébuleuse sur le passage de Petro-tim à Timis Corporation puis à Kosmos, dans l’affaire des blocs offshore de St-Louis et Kayar reste à éclaircir, car «l’Inspection générale d’Etat a clairement indiqué que le permis d’exploitation ne devait pas être donné à Petro-tim».
Malheureusement, le gouvernement est passé outre les indications données par l’Inspection générale d’Etat. Sur ce point précis, Mamadou Lamine Diallo incrimine directement l'actuel ministre de l’Intérieur, qui était, au moment des faits, ministre de l'Energie.
«Aly Ngouille Ndiaye a passé outre et a produit un faux rapport de présentation pour forcer la signature du décret d’attribution. Ce genre de pratique où la rente est partagée entre les firmes pétrolières et les chefs politiques africains est à l’origine de la malédiction des matières premières en Afrique. Les Etat occidentaux le savent. Ils ont mis en place l’Initiative pour la transparence des industries extractives (ITIE) pour se dédouaner, et dire ensuite aux peuples africains les montants versés aux Etats. Quid des montants versés directement aux chefs politiques africains?», a conclu ce député.
Petite précision (de taille): Mamadou Lamine Diallo s'est porté candidat à la prochaine présidentielle, dont le scrutin est prévu en février 2019...