Algérie: les ministres sommés de respecter une sévère cure d’austérité pour pallier l'asphyxie financière

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Le 25/01/2021 à 16h05, mis à jour le 26/01/2021 à 16h03

L'Algérie connait une asphyxie financière inquiétante. A court d'options, le Premier ministre Abdelaziz Djerad demande à son équipe de se tenir à une véritable diète sur les dépenses, insistant sur les factures d’eau, d’électricité, de téléphone,… qui doivent être réduites au strict minimum.

C’est un pléonasme que de soutenir que l’Algérie traverse une crise financière aiguë. Mais de là à ce que le Premier ministre Abdelaziz Djerad face une sortie pour donner ses instructions à tous ses ministres les invitant à davantage d’austérité dans la gestion des deniers publics en exigeant la réduction des dépenses au strict minimum, on comprend que la situation que traverse le pays est plus grave que les autorités ne veulent l’admettre.

Ainsi, dans sa dernière instruction, le Premier ministre a invité les membres du gouvernement à une sévère cure d’austérité dans la gestion des dépenses publiques.

N’ayant plus de dépenses importantes à grignoter après le gel de presque tous projets d’investissements, le Premier ministre, qui ne sait plus comment faire pour financer le budget de 2021, met l’accent sur les coupes des dépenses. Et aucune coupe ne sera négligée.

«L’analyse des données liées à la situation financière de la fin de l’année confirme la tendance baissière des réserves des liquidités du Trésor public (…) je demande aux ministres de prendre des dispositions nécessaires pour réduire les dépenses», a-t-il expliqué.

Face à cette situation, il administre une diète à tous les ministres en les sommant de réduire les factures d’eau, d’électricité, des téléphones fixe et portable, etc.

Et ce n’est pas tout, le Premier ministre, mécontent du rendement de son gouvernement, à l’instar du président Abdelmadjid Tebboune, demande aussi aux membres du gouvernement de réduire l’organisation des congrès, conférences et journées d’études. Et quand ces évènements sont indispensables, le Premier ministre demande aux ministres de privilégier les visionconférences.

Même les sorties sur le terrain doivent désormais être limitées au strict minimum avec réduction des membres des délégations lors des déplacements. Et afin de réduire les dépenses, ils doivent utiliser les moyens de transport collectifs pour réduire les factures de carburant.

Bref, avec cette sortie, on comprend clairement que la situation financière du pays est catastrophique. Le pays est au bord de l’asphyxie financière à cause notamment de la chute des recettes tirées des hydrocarbures. Celles-ci ont baissé de 40% à 20 milliards de dollars en 2020, comparativement à l’exercice précédent. Or, ces recettes représentent 95% de la valeur des exportations d’Algérie, mais aussi et surtout entre 50 et 60% des ressources budgétaires du pays. Du coup, le manque à gagner pour le budget de l’Etat est énorme.

Du coup, le déficit budgétaire s’est creusé en 2020 à 17% du Produit intérieur brut (PIB) pour s’établir autour de 14 milliards de dollars et ce, en dépit de la «dévaluation déguisée» du dinar pour gonfler artificiellement les recettes une fois exprimée en monnaie locale.

Et la situation ne devrait pas s’améliorer cette année sachant que pour retrouver l’équilibre budgétaire, l’Algérie a besoin d’un cours du baril de pétrole à 107 dollars. Or, dans le meilleur des cas, le cours du baril devrait osciller autour des 50 dollars, selon les projections des analystes et observateurs.

En outre, le gouvernement ne peut compter sur les recettes fiscales, autre que pétrolières, à cause notamment de la crise économique aggravée par la pandémie du coronavirus et les politiques économiques du gouvernement qui ont mis à genou des pans de l’économie du pays. Du coup, de nombreuses entreprises qui contribuaient aux ressources fiscales du pays sont soit en faillite, soit dans des situations financières difficiles et donc ne peuvent pas contribuer aux ressources du budget de l’Etat.

Enfin, ayant abandonné la planche à billets et ne voulant pas recourir à l’endettement extérieur, le gouvernement se retrouve dans une situation intenable pour financer son budget 2021 au moment où les réserves en devises du pays sont à un niveau historiquement bas.

In fine, la seule option populiste qui reste pour le gouvernement est la cure d’austérité sévère imposée aux ministres.

Par Karim Zeidane
Le 25/01/2021 à 16h05, mis à jour le 26/01/2021 à 16h03