Enfin, Abdelmadjid Tebboune revient à la raison. Le président algérien a compris que sa politique d’interdiction des importations le menait vers la catastrophe. Les pénuries tous azimuts et les flambées des prix qui touchent tous les produits, et particulièrement ceux de première nécessité, ont fait chuter le pouvoir d’achat des Algériens à un niveau inquiétant. Une situation qui risquent d’entraîner plus de tensions sociales aux conséquences incalculables pour un régime déjà honnis par la population.
Ainsi, Tebboune avait menacé de prison les spéculateurs, qualifiés de "parasites", de peines allant jusqu’à 30 ans. Mais il a compris que l’incrimination des commerçants ne résout en aucun cas le problème, qui s’explique par une insuffisance inquiétante de l’offre de produits. D’où le changement du cap avant qu’il ne soit trop tard, surtout avec les annonces des premières grèves dans des secteurs clés à cause des pertes de pouvoirs d'achat.
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«Il faut résoudre les préoccupations des citoyens concernant les secteurs du commerce et de l’agriculture et lutter contre la hausse des prix, même si l’on doit recourir à l’importation, à titre urgent et exceptionnel, pour préserver le pouvoir d’achat», a souligné le président algérien. Et d'ajouter que s’il le faut «inonder le marché par les produits touchés par la spéculation, notamment les produits de large consommation et ceux entrant dans la production de viandes blanches».
Il s’agit d’un aveu d’échec de la politique d’interdictions d’importations accentuées au cours de ces dernières mois par les autorités algériennes. Des politiques qui sont derrière certaines pénuries et qui ont contribué à déséquilibrer l’offre et la demande de nombreux produits, contribuant à une flambée généralisée des prix.
Ainsi, durant ces dernières semaines, tous les prix des produits ont subi de fortes hausses. A titre d’illustration, les pâtes ordinaires, très consommées par les Algériens, ont vu leur prix passer de 40 à 80 dinars. Le lait subventionné vendu à 25 dinars avait disparu des radars pour laisser la place au lait conditionné coûtant 90 dinars jugé plus rentable par les producteurs.
Quant à la pomme de terre, en dépit des effets d’annonces sur le destockage d’importantes quantités, les Algériens restent choqués par des prix qui ont atteint 150 dinars. Un niveau inquiétant pour un légume considéré comme le moins cher et d’autant plus inadmissible que sa qualité est médiocre. Quant aux viandes, elles sont tout simplement hors de portée des citoyens. Le kilogramme de viande de mouton est proposé à 2.000 dinars, alors que celui du poulet atteint les 500 dinars.
Une situation devenue intenable pour les Algériens qui voient leur pouvoir d’achat se détériorer de jour en jour. Ce qui a poussé la Confédération algérienne des syndicats autonomes, qui regroupe 14 syndicats de différents secteurs, a menacé de déclencher des mouvements de protestation contre l’érosion du pouvoir d’achat. «La situation sociale actuelle n’augure rien de bon, et nous risquons de connaître une explosion du front social à la rentrée devant la terrible baisse du pouvoir d’achat», avertissaient les syndicalistes en septembre dernier.
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Le Conseil national autonome des professionnels de l’éducation a annoncé une grève nationale de deux jours, le 2 et le 3 novembre 2021. Outre la revalorisation salariale pour atténuer la chute du pouvoir d’achat, les enseignants appellent les pouvoirs publics à accorder une «priorité absolue» au dossier du logement. De leur côté, des professionnels de la santé, trois syndicats de la santé qui forment l’Intersyndicale de la santé, ont appelé jeudi 28 octobre à une journée nationale de protestation, le mercredi 3 novembre, pour marquer le début de leurs actions revendicatives. Parmi les revendications des professionnels de la santé figure l’application des directives du président Tebboune, dont particulièrement «la prime Covid» aux personnels de la santé et à leurs ayant droit décédés du Covid-19, la couverture à 100% de l’assurance du personnel de la santé, la bonification des cotisations à la retraite, l’augmentation des salaires avec une nouvelle grille et un doublement de la valeur du point indiciaire.
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Toutes les professions appellent à l’urgence d’une réponse effective face à la dégradation du pouvoir d’achat des Algériens. Il faut dire que toutes les études montrent qu'Ils survivent, mais ne vivent plus. En effet, selon une étude sur les salaires rendue publique par les syndicats, la rémunération de base ne devrait pas baisser sous la barre des 50.000 dinars. Or, actuellement, le SMIG se situe à 20.000 dinars, soit 147 dollars, et le salaire moyen autour de 35.000 dinars, soit 257 dollars. Conséquence, expliquent les experts algériens, 34% des travailleurs algériens sont menacés de pauvreté.
Derrière ce changement de stratégie d'Abdelmadjid Tebboune se cache donc plusieurs facteurs. D’abord, il y a la prise de conscience, tardive certes, de l’effet néfastes des pénuries de nombreux produits sur le consommateur final. En effet, l’Algérie ne produisant pas grand-chose, les interdictions aux importations se sont traduites par des pénuries de toutes sortes: véhicules, produits alimentaires, électroménager… Et même ceux produits localement ont vu leurs prix flamber à cause des importations d’intrants non produits localement et de la dépréciation continue du dinar algérien face aux devises étrangères, notamment l’euro et le dollar.
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Ensuite, si Tebboune pense désormais aux citoyens, c’est que la hausse du cours du baril de pétrole a permis à l’Algérie de reconstituer son matelas de réserves en devises dont la chute vertigineuse était à l’origine des interdictions d’importation.
Enfin, les pertes de pouvoirs d’achats ont entraîné des tensions sociales avec les premières grèves annoncées dans des secteurs vitaux (éducation et santé) et qui risquent de faire tâche d’huile et de se propager à toutes les professions. Il s'agit donc d'étouffer ces tensions avant qu’elles ne deviennent incontrôlables.