Éditorial cinglant du journal "Le Monde" contre le régime répressif algérien

Les manifestations se sont multipliées pour exiger la libération de figures comme Khaled Drareni.

Les manifestations se sont multipliées pour exiger la libération de figures comme Khaled Drareni. . DR

Le 16/09/2020 à 16h09, mis à jour le 17/09/2020 à 14h07

C’est dans un style au vitriol, parlant d’une "dictature" qui "ne veut pas se réformer", que l’éditorialiste du quotidien français "Le Monde" a analysé la répression du régime. Tebboune y est décrit comme celui qui fait tout pour préserver le système qui l’a porté au pouvoir.

Le régime algérien qui vient de condamner Khaled Drareni, un journaliste devenu le symbole de la liberté d’expression, à deux ans de prison, en prend pour son grade dans l’éditorial du journal Le Monde de ce mercredi 16 septembre.

Le quotidien français analyse sans concession la répression menée par la "dictature" algérienne qui, après avoir été acculée par "un mouvement de contestation exemplaire", n’a "pas respecté la trêve" imposée par le Covid-19, à la différence de la société civile.

"Au contraire: il l’a mise à profit pour affiner la répression, cibler les arrestations et isoler les figures du Hirak, qui, d’une certaine manière, étaient protégées par les manifestants lorsque ceux-ci pouvaient se rassembler massivement dans les rues", écrit l’éditorialiste qui estime que, pour le cas d’espèce, le Covid-19 est le "meilleur allié des régimes autoritaires en Algérie comme à Hong Kong".

Khaled Drareni, le jeune journaliste de 40 ans, est justement de ces figures marquantes que le régime d’Abdelmadjid Tebboune essaie de réduire au silence. Il a fait l’objet d’intimidations à plusieurs reprises. S’il n’est pas convoqué, il est interpellé par la sécurité intérieure qui n’a cessé de lui intimer l’ordre de se taire. Car ses publications très suivies, notamment sur les réseaux sociaux, ont toujours dérangé un régime qui tente d’usurper au Hirak sa révolution.

L'arrestation de Drareni le 27 mars, qui fait suite à une série répressive contre les journalistes et les médias, était prévisible, car le "pouvoir est obsédé par sa survie" alors qu’en "dictature, l’information libre est aussi dangereuse que l’agitation politique".

Du coup, il fallait absolument faire taire ce correspondant de TV5 Monde et de l’ONG Reporters sans frontières.

Mais "sa condamnation en appel, mardi 15 septembre, à deux ans d’emprisonnement pour «incitation à attroupement non armé et atteinte à l’intégrité du territoire national» est un aveu de faiblesse de la part d’un pouvoir obsédé par sa survie, incapable de dialoguer avec son peuple et enfermé dans un mode de gouvernement autoritaire et répressif", estime Le Monde.

Il s’agit aussi d’une "très mauvaise nouvelle pour l’Algérie". Car, la condamnation de Drareni "montre que le régime du président Abdelmadjid Tebboune, 74 ans, élu le 13 décembre 2019 à l’issue d’un scrutin massivement boudé par la population et aussitôt contesté dans la rue, n’entend pas changer de méthode, en dépit de promesses de réformes".

Tebboune est en quelque sorte un loup qui essaie de se présenter aux Algériens avec un visage d’agneau, en affirmant "vouloir tenir compte du message transmis par la mobilisation de la société algérienne", note l’éditorialiste.

Il "apparaît de plus en plus clairement" que celui qui fut longtemps aux côtés de Bouteflika et a même été son Premier ministre "n’entend pas réformer" ce même régime qui l’a aidé à arracher au peuple sa révolution, et "encore moins le remettre en question, mais simplement procéder à quelques aménagements institutionnels à la marge", écrit la même source.

"Un tel scénario ne saurait s’accommoder de trublions tels que les journalistes indépendants", estime le quotidien français.

Par Mar Bassine Ndiaye
Le 16/09/2020 à 16h09, mis à jour le 17/09/2020 à 14h07