Kiosque. Le 360 Afrique: Le grand barrage de la Renaissance que construit actuellement l’Ethiopie inquiète ses voisins du nord, particulièrement l’Egypte, pays dont le Nil est la source nourricière depuis la nuit des temps, en lui apportant plus de 93% de ses besoins en eaux.
Ainsi, selon Le Figaro, «la construction de l’immense barrage de la Renaissance en Ethiopie provoque des tensions avec l’Egypte. Les deux Etats revendiquent une souveraineté sur le fleuve». D’où la question de savoir si la guerre pour les eaux du Nil aura lieu ou non?
Il faut dire que l’Egypte a de quoi s’inquiéter. En effet, la construction du plus grand barrage continental par l’Ethiopie sur le Nil bleu, qui assure plus de 75% des eaux du Nil, à quelques kilomètres de sa frontière avec le Soudan, menace l’approvisionnement en eau de l’Egypte, voire l’existence même du pays des pharaons. Du coup, il n’est pas exclu que la tension qui couve au niveau des deux pays se transforme en conflit au cas où la menace de la baisse de l’approvisionnement en eau de l’Egypte devienne une réalité.
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En effet, le barrage, dont l’inauguration aura probablement lieu cette année, est tout simplement pharaonique. Long de 1.800 mètres, haut de 175 mètres, et disposant d’une capacité de 74 milliards de mètres cubes, avec un lac de 1.500 kilomètres carrés, le futur plus grand barrage hydroélectrique d’Afrique aura une capacité de 6.400 GW et impulsera le développement de l’Ethiopie dont la demande en électricité croît de 30% par an pour un pays peuplé de presque 100 millions d’habitants.
Au-delà de son apport économique, «ce projet est plus qu’un simple investissement structurel. Le très nationaliste et omnipotent parti au pouvoir, le Front démocratique révolutionnaire des peuples éthiopiens, en a fait un symbole, d’où le nom choisi», souligne Le Figaro.
D’un coût estimé à plus de 4,5 milliards de dollars, financé en partie par les Ethiopiens, mais aussi par les banques chinoises, le barrage réalisé par une firme italienne a été construit sans de véritables études d’impact environnemental. C'est pourquoi les bailleurs de fonds ont boudé le projet.
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Mais, «au-delà des peurs légitimes pour la nature, les frictions régionales, nées de la construction de ce barrage, ont joué un rôle majeur dans la prise distance des bailleurs de fonds. Aujourd'hui bâti à plus 70 %, le barrage de la Renaissance pourrait être mis en eau dès 2018. Et ce projet a beau être qualifié de pharaonique, il déplaît souverainement à l'Égypte».
Les inquiétudes de l’Egypte sont légitimes. «L’Egypte est un don du Nil», écrivait Hérodote. En effet, 97% des besoins d’eau des Egyptiens son assurés par le Nil. Partant, toute construction pouvant affecter le cours du fleuve impacte négativement sur l’Egypte. Selon le ministre des Eaux et de l’irrigation égyptien, si le flot qui arrive en Egypte baisse de 2%, nous pourrions perdre environ 200. 000 arpents (un demi-hectare) de terre cultivable. Or, une arpente nourrit une famille. Et, si on considère qu’une famille compte cinq personnes, cela veut dire qu’un million de personnes pourrait se trouver sans ressources».
En plus de cet impact, l’Egypte a toujours considéré le Nil comme «sa» propriété, alors que le fleuve concerne 7 autres pays sur sa longueur de 6.700 km. Et un traité de 1959 lui octroie 55,5 milliards de mètres cubes et un droit de regard sur les constructions en amont.
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Seulement, lorsque le gouvernement éthiopien a entamé la construction du barrage, l’Egypte était empêtrée dans sa révolution. Reste que pour tous les dirigeants égyptiens, la question du Nil est vitale. Anouar el-Sadate avait déclaré en 1978 que «seule l’eau pouvait le faire entrer en guerre». En 2013, le président Morsi avait menacé la destruction du barrage qualifié d’ouvrage de «complot américain et sioniste».
Avec le régime d'Al-Sissi, la destruction du barrage n’est plus à l’ordre du jour, mais la bataille se situe désormais au niveau du temps nécessaire pour remplir le lac du barrage. Un accord tripartite avec le Soudan et l’Ethiopie est signé en 2015. Seulement, cet accord est un échec.
Pour l’Egypte, la dernière bataille concerne le nombre d’années nécessaire pour remplir le réservoir du barrage. Si l’Ethiopie table sur une durée de 5 ans au maximum pour remplir le lac du barrage, l’Egypte souhaite que cette période soit étalée sur 8 à 10 ans, expliquant qu’un remplissage rapide du lac du barrage «ferait peser des danger sur les pays en amont». Seulement le Soudan n’est pas inquiété par le barrage et table surtout sur l’excédent d’électricité du barrage que lui promet son voisin éthiopien. Il faut souligner que 80% des eaux du Nil qui alimente l'Egypte proviennent du Nil bleu qui prend sa source en Ethiopie.
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Ainsi, l’Egypte se sent isolée, d’autant plus que les autres pays regroupés au sein des Etats de l’initiative du bassin du Nil, regroupant 9 pays riverains du Nil (*), soutiennent l’Ethiopie, car se sentant aussi marginalisés par le traité de 1959 qui se fonde sur celui de 1929, négocié avec la Grande-Bretagne, puissance coloniale. Certains pays comme le Kenya et l’Ouganda soulignent qu’ils ne se sentent plus concernés par un traité colonial.
Seulement, avec une démographie galopante, le Nil abritera plus de 600 millions de personnes à l’horizon 2030, contre 300 millions en 2000. Le problème de l’eau risque de se poser avec beaucoup d’acuité dans les années à venir au niveau de cette région, à moins que les pays de la région n’adoptent une gestion plus rationnelle des eaux du Nil dont 85% sont utilisées dans l’agriculture. C’est la clé pour éviter le gaspillage de l'eau et peut être les conflits.
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(*) Soudan, Éthiopie, Kenya, Ouganda, Rwanda, Burundi, Tanzanie, République démocratique du Congo et Egypte.