«On se bat, jusqu'au sacrifice suprême...», lance l'un des jeunes militaires congolais en treillis devant les caméras d'une petite poignée de journalistes, dont un de l'AFP, qui ont accompagné l'armée cette semaine dans le nord du parc national des Virunga.
Juste avant, les lance-roquettes multiples étaient entrés en action depuis le camp militaire de Semuliki, une ancienne base de l'ONU située à l'intérieur du parc, où 15 Casques bleus tanzaniens avaient été tués par des ADF en 2017.
Célèbre pour ses gorilles de montagne, qui vivent dans sa partie sud, le parc est aussi utilisé comme base arrière par divers groupes armés qui sévissent depuis un quart de siècle dans l'est de la République démocratique du Congo, dont les ADF dans sa partie nord.
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C'est là qu'un QG provisoire conjoint a été installé. Un thermos de café est posé sur une table de camping. Deux généraux, l'Ougandais Kayanja Muhanga, le Congolais Bertin Mputela, discutent des opérations, pendant que des fantassins de l'unité congolaise de combat de jungle et de l'unité ougandaise de montagne s'enfoncent dans la forêt.
L'intervention déclenchée le 30 novembre par l'aviation et l'artillerie ougandaises contre les bases des rebelles ADF dans l'est de la RDC est dans sa troisième semaine.
Collaborer avec l'armée
Aucun bilan de morts ou blessés n'a été diffusé, seul un point «préliminaire» rendu public le 11 décembre a fait état de 34 «terroristes capturés», «4 bivouacs ennemis détruits» et «31 otages congolais libérés». L'armée ougandaise a affirmé en début de semaine que «trois positions ennemies supplémentaires» avaient été ciblées par des frappes aériennes et d'artillerie.
Juste après les premiers bombardements, qui avaient visé le nord de la province du Nord-Kivu et le sud de l'Ituri, des troupes ougandaises au sol étaient entrées en territoire congolais par le poste-frontière de Nobili. Une base avancée était ensuite installée à une dizaine de km, le temps de réparer la route en mauvais état et d'ouvrir la voie aux engins lourds.
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Le capitaine Antony Mualushayi, porte-parole des Forces armées de RDC (FARDC) dans la région de Beni (Nord-Kivu), estimait en fin de semaine dernière à «plus ou moins 48 heures» le temps encore nécessaire pour rendre la route praticable et permettre dans les Virunga une opération terrestre d'ampleur.
Mardi, au QG installé dans le parc, il se félicitait de la progression de l'intervention contre les ADF (Forces démocratiques alliées), des rebelles accusés d'attentats jihadistes sur le sol ougandais et de massacres répétés de civils en RDC, où ils sont implantés depuis 1995.
«Les opérations de grande envergure avancent extrêmement bien sur le terrain», a-t-il affirmé aux journalistes, en demandant aux populations de la région de «ne pas paniquer à cause des armes lourdes».
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Dans le même temps, le coordonnateur congolais de l'opération, le général major Camille Bombele, est arrivé à Beni. Il a appelé mercredi les habitants à saisir «la main tendue» par les président congolais Félix Tshisekedi et ougandais Yoweri Museveni, qui «ont accepté d'unir leurs forces pour imposer la paix» dans la région. Il faut «collaborer, avec l'armée et la police», leur a-t-il dit.
Le Nord-Kivu et l'Ituri sont depuis début mai sous état de siège, une mesure exceptionnelle qui a donné pleins pouvoirs aux militaires mais qui n'a pas permis jusqu'à présent de stopper les exactions des groupes armés. Les habitants, épuisés par des années de tueries et d'insécurité, ont plutôt bien accueilli l'intervention de l'armée ougandaise, mais ils n'ont pas oublié le rôle passé de leurs voisins dans la déstabilisation de leur région et craignent qu'elle ne s'éternise.
Dans son discours à la nation, lundi, Félix Tshisekedi s'est engagé à veiller à ce que l'armée ougandaise ne reste en RDC que le temps nécessaire à la lutte contre les ADF.