Niger: la viande rouge à toute heure, à toutes les sauces

le360 Afrique/Sarki

Le 15/01/2022 à 09h32, mis à jour le 15/01/2022 à 09h38

Au Niger, la viande rouge se mange à toute heure et à toutes les sauces. On trouve de la savoureuse viande grillée à tout coin de rue de la capitale. La surconsommation d'agneaux est telle que les nutritionnistes alertent sur ses effets néfastes sur la santé de la population.

Le Niger, qui est donc un gros producteur de viande, en est également un important consommateur. La consommation de la viande rouge dans la sauce ou grillée par les bouchers au petit déjeuner, au déjeuné et même au dîner est devenue au fil des décennies un phénomène culturel véritablement ancré dans les habitudes des uns et des autres. La viande rouge est donc considérée au Niger comme une nécessité culinaire, l’aliment par excellence, celle qu’on offre aux invités, celle qu’on partage le plus lors des cérémonies ou des réceptions de tout genre.

A Niamey, déjà au petit matin, on peut observer sur les principales artères de la ville ou devant les administrations, les écoles, les marchés, les carrefours, les marchands de viandes grillées déjà en activité avec une importante affluence de la clientèle. Pour bon nombre de nigériens, le menu du petit déjeuner prend nécessairement en compte quelques morceaux de cette viande grillée ou braisée.

«Manger la viande au Niger c’est en quelque sorte un signe d’aisance. Quand vous voyez quelqu’un manger de la viande grillée cela veut dire qu’il appartient à la classe moyenne», déclare salifou illa, résident de la ville de Niamey.

«Le Nigérien pense que faire une sauce sans viande est devenu péjoratif dans notre contexte actuel. Quand un Nigérien a 5.000 fcfa, une partie de cet argent ira dans la consommation de la viande grillée», déclare Omar, étudiant en médecine.

«Selon une étude qui a été faite sur la consommation de viande, l’OMS recommande de consommer entre 100 et 150 grammes de viande par jour. Or, au Niger, cette consommation dépasse largement les 100 à 150 grammes par jour. Elle prend même de plus en plus de l’ampleur», explique Abdoul Razak Bello, nutritionniste.

Cette consommation abusive de la viande au Niger s’illustre par les quantités considérables de mammifères (moutons, bœufs, chèvres, porcs,) égorgés, grillés et consommés chaque jour dans la ville de Niamey et dans le pays. Les Nigériens sont reconnus au-delà des frontières du pays pour leur savoir-faire dans la grillade de la viande. On les retrouve en activité un peu partout dans les pays de la sous région.

«Dans cette période de froid et malgré que les gens rentrent tôt chez eux, je grille cinq moutons par jour et je vends pratiquement tout», explique Abdoulaye, vendeur de viande grillée.

«Dans ma boucherie, d’habitude c’est 3 à 4 moutons qui sont grillés par jour. On en faisait plus avant, mais la quantité a été réduite à cause du nombre réduit de clients», déclare omar, vendeur de viande grillée.

«C’est devenu une habitude pour moi. Tous les jours, je viens chez le marchand de viande en acheter pour mon déjeuné et c’est ici que je trouve la viande à mon goût», déclare Abdoul Kader Ibrahim, consommateur de viande.

La viande rouge consommée au Niger est issue du bœuf, du mouton, de la chèvre, du porc et du chameau. Sa consommation excessive n’est pourtant pas bonne pour la santé. Si elle nous apporte du fer, des vitamines et des protéines, elle contient également des gras saturés qui s’accumulent dans nos artères et provoquent des problèmes de santé notamment le risque de cancers, de dépression et de maladies cardiovasculaires. Des maladies que l’on trouve en effet au Niger et qui deviennent récurrentes.

«La consommation de la viande rouge contient des avantages puisqu’elle peut satisfaire les besoins en protéine pour un individu. La première maladie associée à la consommation excessive de la viande rouge c’est la goutte, qui se traduit par un excès de l’acide urique au niveau de l’organisme, et elle peut avoir des conséquences fâcheuses avec des douleurs insupportables pour la personne qui en souffre. En plus de la goutte, la consommation de viande est associée à la consommation excessive de graisse. Cela peut favoriser l’obésité et la survenue des maladies cardiovasculaires», explique Abdoul Razak Bello, nutritionniste.

«En tant qu'étudiant en médecine et stagiaire, je peux vous dire que aujourd’hui dans nos services cardiovasculaires et rhumatisme on enregistre beaucoup de patients avec des pathologies cardiovasculaires et cela est dû surtout à la consommation excessive de la viande rouge», déclare Omar étudiant en médecine.

Un changement d’habitude alimentaire s’avère donc crucial dans ce contexte de grande consommation de viande rouge.

Rappelons que le cheptel nigérien est évalué à environ 70 millions de têtes de bétail toutes espèces confondues. Le secteur de l’élevage constitue une part importante de l’économie du pays et pourvoit à hauteur de 15% du PIB (Produit intérieur brut), il absorbe, à lui seul, environ 87% du temps de travail intégral ou partiel de la population active, selon les chiffres du ministère de l’Elevage, de septembre 2019.

Par Aboubacar Sarki (Niamey, correspondance)
Le 15/01/2022 à 09h32, mis à jour le 15/01/2022 à 09h38