La hausse des contagions au Covid-19 suscite des interrogations dans un des rares pays africains à avoir vacciné grandement sa population. Depuis début mai, le pays a enregistré plus de la moitié des cas enregistrés dans le pays depuis l’apparition du premier cas de Covid-19 dans l’archipel. Sur un cumul de 15.116 cas, dont 1.424 toujours actifs et 63 décès, plus de 10.000 ont été enregistrés durant les deux derniers mois (mai et juin 2021).
Avec une population de 95.000 habitants, les Seychelles comptent 70.671 personnes vaccinées dont 67.305 qui ont reçu les deux doses, c’est-à-dire complètement vaccinées. C’est dire que plus de 72% de la population totale de l’archipel ont été vaccinés. En tenant compte de la cible des personnes âgée de plus de 17 ans, ce sont alors plus de 92% des adultes qui ont été totalement vaccinés. Un niveau de vaccination qui devrait offrir une certaine immunité au pays. Ce qui est loin d’être le cas, poussant l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a y dépêcher trois spécialistes pour comprendre la situation.
Lire aussi : Covid-19: inquiétude en Afrique à cause du variant Delta, même chez les personnes déjà vaccinées
Depuis la réouverture des frontières du pays, les cas de Covid-19 ont, en effet, fortement augmenté, surtout depuis début mai dernier, avec un pic de 1.799 cas enregistrés le 10 mai, suscitant des interrogations sur les raisons de cette hausse dans un pays qui a fortement vacciné.
Comment expliquer cette hausse des contagions alors que la quasi-totalité des adultes de l’archipel est vaccinée? Trois facteurs sont globalement avancés pour déchiffrer cette situation qui pourrait affecter de nombreux pays africains à l’heure des ouvertures des frontières.
D’abord, il y a l’efficience des vaccins anti-Covid-19. Réalisés dans des délais records, les vaccins anti-Covid-19 sont globalement efficaces avec des taux compris entre 66 et 95%. Autrement dit, selon les vaccins administrés, il y a déjà le risque qu’une partie des personnes vaccinées ne soit pas immunisée par les sérums. Et cette partie varie en fonction de l’efficacité du vaccin.
Dans tous les cas, quelque soit le degré d’efficacité, tous les vaccins semblent contribuer à l’immunisation d’une partie significative de la population vaccinée et surtout réduisent fortement les risques de formes graves de Covid-19 et donc des décès liés à la pandémie.
Lire aussi : Covid-19. Afrique: inquiétude avec la troisième vague et l'absence de vaccins
Et si des formes graves sont rarement signalées chez les personnes vaccinées qui contractent le Covid-19, à peine un mois après l’ouverture des frontières, c'est que plus du tiers des personnes contaminées au Covid-19 avaient déjà reçu les deux doses d’un des deux vaccins administrés dans l’archipel (Sinopharm et AstraZeneca).
Ensuite, et toujours en ce qui concerne les vaccins, il faut souligner que les tests des vaccins anti-Covid-19 ont été effectués sur la base de la souche originelle du Covid-19. Seulement, depuis, les variants se sont multipliés (anglais, sud-africain, brésilien, indien, etc.). Et globalement, ces variants sont plus résistants que la souche originelle face aux vaccins développés, notamment ceux qui n’utilisent pas la technologie ARN.
Lire aussi : Covid-19: de plus en plus de pays africains sur les listes rouges européennes à cause du variant indien
Et les vaccins Sinopharm (vaccin chinois) et Covishield (version indienne du vaccin d’AstraZeneca) sont considérés par certains comme moins efficaces. D’ailleurs, le Covishield est connu pour manquer d’efficacité face au variant sud-africain, présent aux Seychelles depuis février dernier.
On note aussi des recrudescences des cas de Covid-19 dans d'autres pays ayant recouru aux vaccins à ARN (Pfizer-BioNTech et Moderna). Ainsi, Israël qui a vacciné sa population avec le vaccin Pfizer-BioNTech connaît une recrudescence des cas de Covid-19 depuis quelques jours obligeant sa population au port obligatoire du masque.
En clair, le vaccin contribue à immuniser, mais son efficacité se réduit face à l’émergence de nouveaux variants. Ce qui peut expliquer, en partie, la hausse des cas de Covid-19 dans l'archipel des Seychelles.
Lire aussi : Covid-19. Réouverture des frontières: voici pourquoi les Africains risquent de rester à quai
Par ailleurs, cette hausse des cas au Seychelles s’explique grandement par l’ouverture des frontières. A l’instar de nombreux pays, les Seychelles ont ouvert les leurs pour sauver leur économie dépendante du tourisme qui pèse jusqu’à plus de 30% du PIB du pays. Ayant vacciné plus de la moitié de sa population à cette date, le gouvernement a autorisé l’accès au pays aux personnes munies de test PCR négatif effectué dans les 72 heures avant le départ, croyant certainement à l’immunité de sa population. Or, le délai de 72 heures ne garantit pas que le touriste n’a pas contracté le coronavirus entre le jour du test et son arrivée sur le territoire de l’archipel.
Du coup, de nombreux touristes déjà contaminés au Covid-19 ont contribué à propager le virus dans l’archipel dont la population avait baissé la garde se croyant immunisée. D’ailleurs, plus de 16% des malades enregistrés lors des pics de contagions étaient des touristes. C’est dire que la réouverture des frontières a joué un rôle significatif dans le rebond de la pandémie aux Seychelles.
Enfin, la hausse des contagions s’explique aussi par le relâchement de la population seychelloise après les contraintes sanitaires imposées par les autorités pour freiner les contaminations. Conséquence, les autorités ont rapidement imposé de nouvelles contraintes, fermé les bars, les écoles, arrêté des activités sportives,…
Lire aussi : Covid-19: Maroc, Algérie et Tunisie, voici où en est la vaccination
Le vaccin contribue à l’immunité des populations. Toutefois, il est loin d’être une garantie d’immunité à 100%. En conséquence, l’exemple des Seychelles et d’Israël montrent qu’en plus des vaccins, il est essentiel de continuer à respecter les gestes barrières: port du masque, distanciation physique, lavage régulier des mains, utilisation de gel hydroalcoolique…
Malheureusement, dans presque tous les pays, particulièrement au niveau du continent africain où la pandémie a fait officiellement moins de ravages, on note un net relâchement de la population qui n’est pas habituée, il faut le reconnaître, à ses gestes barrières et aux confinements à cause notamment des habitudes sociales.