Premier pays arabe à atteindre la finale de la CAN féminine, le Maroc retient son souffle avant la finale de "sa" CAN qui sera disputée à guichets fermés samedi (22h00 françaises).
"On a réussi à changer le regard du public (sur le foot féminin), on aimerait maintenant écrire l'histoire et remporter cette CAN", estime Ghizlane Chebbak, capitaine de l'équipe marocaine.
"Les gens ont vu comment on joue, comment on se bat pour notre pays, on le fera jusqu'au bout", promet la milieu de terrain de 31 ans qui espère soulever le trophée 46 ans après son père Larbi Chebbak, vainqueur de la CAN masculine avec le Maroc en 1976.
Les Lionnes de l'Atlas ont créé la surprise en éliminant en demi-finales les favorites et tenantes du titre nigérianes (1-1 après prolongation, 5 tab à 4).
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Grâce à ce résultat obtenu devant 45.000 spectateurs, un record d'affluence pour un match d'une CAN féminine, elles ont également décroché leur billet pour la Coupe du monde 2023 en Australie et Nouvelle-Zélande, un exploit sans précédent pour une équipe féminine arabe.
- "Emancipation" -
"On a gagné des matches aboutis et cohérents, on y a mis beaucoup de cœur et d’envie. Les gens ne sont pas stupides, ils voient bien que cette équipe est fantastique", estime le sélectionneur du Maroc, l'ancien international français Reynald Pedros.
Pourtant, son équipe vient de loin.
"Il y a un an et demi, elles étaient inconnues au bataillon", explique à l'AFP Fatima Bartali, spécialiste du football féminin.
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"Ce qu'elles ont accompli durant cette CAN est le fruit d'un travail de fond", ajoute l'ancienne "project manager" de la Ligue marocaine de football féminin créée en 2019.
La fédération marocaine a mis en place en 2020 une nouvelle stratégie pour développer le foot féminin qui battait de l'aile.
Objectifs: professionnaliser le championnat et accélérer la formation pour atteindre les 90.000 joueuses et 10.000 entraîneurs à l'horizon 2024.
"Le foot féminin peinait à bouger mais un bon coup de pied a été donné. Cette démarche émane d'une volonté royale, car l'émancipation des femmes passe aussi par le sport", décrypte Fatima Bartali.
- avant les hommes? -
Les préjugés sociaux et culturels ont tendance à disparaître dans un pays où "une partie de la population n’accepte pas qu'une femme soit sur un terrain de football", se félicite-t-elle.
Le challenge reste néanmoins de taille pour les Lionnes (77e au classement mondial de la FIFA) qui devront déjà battre une équipe sud-africaine expérimentée (58e).
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"En Afrique du Sud, l'équipe féminine s'est fait depuis longtemps sa place, les joueuses y sont admirées. Ce sont les sponsors qui peinaient à suivre la cadence", relève Mazola Molefe, journaliste sportif de la TV publique sud-africaine SABC.
Mais "les choses commencent à changer grâce à la progression rapide de plusieurs équipes africaines", ajoute-t-il.
Desiree Ellis, la coach des Banyana Banyana, espère même "voir une équipe féminine africaine gagner la coupe du monde un jour avant une équipe masculine" au regard de "l’énorme talent" des joueuses du continent.
Que les Lionnes gagnent ou pas la finale, qu'importe... "Elles ont déjà réalisé un exploit énorme ! c'est la raison qui m'a poussé à emmener ma fille voir un des matches", raconte Tarik, un chauffeur de VTC.
"Elles ont conquis les coeurs des Marocains qui n'ont pas vu leur équipe nationale de foot en finale d'une grande compétition depuis des décennies".