Le succès de l’industrie automobile marocaine fait des émules au niveau du continent où de nombreux pays essaient d’attirer à leur tour les constructeurs automobiles mondiaux. C’est le cas notamment des pays d’Afrique de l’Ouest, un marché de plus de 420 millions d’habitants et un PIB avoisinant les 700 milliards de dollars, qui intéressent de plus en plus de constructeurs automobiles mondiaux.
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Ces derniers s’y implantent, attirés par les perspectives de croissance et le potentiel énorme de l’industrie automobile au niveau de la région dominée actuellement à hauteur de 85% par les importations de véhicules d’occasion. Les règlementations visant à réduire les voitures d’occasion et les incitations fiscales accordées aux acteurs qui s’implantent dans la région sont également des facteurs d'attrait.
Actuellement, on note la présence d’une dizaine de constructeurs automobiles au niveau de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) dont Toyota, l’une des marques les plus présentes dans cette région ouest-africaine, Nissan, Suziki, Hyundai-Kia, Volkswagen, Renault, Sinotruck, Iveco, Honda, PSA, Ford,...
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Au-delà du montage de marques des constructeurs automobiles mondiaux, par le biais des importation de kits automobiles, on note également la production de marques locales.
Ghana: un hub régional de l’industrie automobile ouest-africain
Le Ghana est devenu, depuis quelques années, un hub du montage automobile en Afrique de l’Ouest grâce à l’implantation de nombreux constructeurs automobiles. Volkswagen (2020), Sinotruck, Toyota-Suziki (2021) ont déjà implanté de petites unités dans le pays.
Pour Toyota-Suziki, l’unité d’un investissement de 7 millions d’euros, située dans la ville de Téma, à 30 km de la capitale Accra, permettra de produire autour de 1.330 unités pour sa première année d’exploitation avec le montage des modèles pick-up de Toyota et deux autres modèles de Suziki.
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Pour Toyota, cette implantation entre dans le cadre de la stratégie de la marque de véhicules la plus vendue au monde qui s’est engagée à étendre ses activités en Afrique en s’implantant dans 5 pays du continent: Nigéria, Egypte, Ghana, Rwanda et Kenya.
L’allemand Volkswagen a opté pour une filiale à 100% qui importe des kits SKD (semi-knocked down – kits automobiles assemblées partiellement) et assemble plusieurs modèles de sa marque (Tiguan, Passat et Teramont) dans son unité d’Accra. Cette unité de montage Volkswagen a une capacité d’assemblage de 5.000 unités par an avec la possibilité de la porter à 30.000 unités annuellement au cas où la demande augmente.
Le japonais Nissan, en partenariat avec Japon Motors Trading Co, son concessionnaire sur le marché local, a investi lui aussi le Ghana où il assemble le modèle de son pick-up Navara. Le groupe japonais continue donc de développer sa stratégie d’implantation en Afrique, avec des présences en Afrique du Sud, Egypte, au Nigéria et donc au Ghana.
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Ce dernier a également réussi à attirer le fabricant chinois de camions lourds Sinotruk international qui s’y est implanté en 2020 et assemble dans le pays 1.500 camions par an destinés au marché local et ouest-africain.
Le constructeur automobile coréen Hyundai et sa filiale Kia ont quant à eux annoncé leur décision de créer une unité de montage au Ghana au cours de cette année 2022. Tout comme le constructeur français Renault qui compte aussi produire dans le pays.
Ces installations devraient permettre la production de 50.000 à 60.000 voitures par an.
Les productions des unités implantées sont destinées aux marchés local et régional et pourraient croître en fonction de la demande du marché.
La présence de ces constructeurs commencent à booster l’industrie des composants et de fabrication de pièces détachées au Ghana.
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Ces implantations s’inscrivent en droite ligne de la mise en œuvre de la politique de développement automobile du Ghana (GADP) qui vise à faire du pays, deuxième économie de la CEDEAO, un centre industriel pleinement intégré et compétitif pour l’industrie automobile dans la sous-région de l’Afrique de l’Ouest.
Et dans le cadre de cette politique, le Ghana a interdit l’importation des véhicules vieux de plus de 10 ans pour booster la production locale, dans le cadre d’une loi promulguée par le président Nana Akufo-Addo, et applique un droit de douane de 35% sur les voitures d’occasion importées. L’objectif est de réduire la part des véhicules d’occasion qui représente environ 80% des importations automobiles du Ghana. De même, les autorités ont interdit l’importation de voitures neuves accidentées.
De plus, le Ghana, 4e pays en matière de qualité de l’environnement des affaires, offre des incitations fiscales prévoyant jusqu’à 10 années d’exonérations et d’allègements pour le secteur de l’assemblage de l’industrie automobile. Ce qui pousse les constructeurs automobiles mondiaux à s’implanter dans le pays. Des mesures qui pourraient coûter jusqu’à 143 millions de dollars en recettes douanières au cours des trois premières années suivant leur mise en œuvre, à partir de 2021. Des pertes de recettes qui pourraient toutefois être compensées par l’implantation de nouveaux investisseurs.
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Autant de facteurs qui expliquent la présence de nombreux constructeurs automobiles mondiaux au Ghana.
Au-delà de la présence de constructeurs automobiles étrangers, on note aussi la fabrication d’une marque locale de voiture: Kantanka. Créée au Ghana par le pasteur et inventeur Kwadwo Safo Kantanka, fondateur et dirigeant de la mission Kristo Asafo du Ghana, la Kantanka Automobile Company Ltd produit à la fois des berlines et des 4x4. Elle produit également des SUV, notamment Nkunimdie et Kantanka Opasuo. Les véhicules Kantanka sont conçus et assemblés au Ghana à partir de kits CKD (complete knock down) fournis par une entreprise chinoise et de composants et matériaux locaux.
L’entreprise ghanéenne assemble et monte au Ghana des véhicules tout terrain, pick-up, cars, minibus et même des voitures électriques. Et la gamme des voitures fabriquées par l’entreprise ghanéenne ne cesse de s’élargir et de se perfectionner. La société assemble actuellement environ 500 véhicules.
Les voitures de la marque circulent au Ghana et dans certains pays africains de la région. Elles répondent à une demande de véhicules neufs, adaptés à l’environnement par leur robustesse et à un prix attractif, dans un marché dominé par les voitures importées des Etats-Unis, du Japon et de la Corée du Sud.
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La première voiture de l’entreprise ghanéenne remonte à 1998. Elle utilisait 75% de composants fabriqués localement. Sur les voitures de la marque, la calandre porte une étoile à cinq branches argentées, le logo de la marque et symbole du Ghana, le tableau de bord est décoré de boiserie provenant de forêts ghanéennes et les sièges en cuir crème sont fabriqués à Kumasi, dans le centre du pays.
L’entreprise a obtenu le soutien du gouvernement ghanéen qui a passé de nombreuses commandes de voitures de la marque jugées solides et adaptées aux contraintes naturelles du pays, au profit de la police et des administrations publiques.
Nigéria: le géant qui n’arrive pas à prendre sa véritable place dans l’industrie automobile mondiale
Le Nigéria, première puissance économique et démographique avec plus de 220 millions d’habitants, du continent, attire naturellement les constructeurs automobiles du monde entier. Il faut dire qu’avec sa population, son économie et ses richesses (premier producteur africain de pétrole) et son parc automobile estimé à moins de 15 millions de véhicules avec un ratio de 1 véhicule neuf pour 4 d’occasion, le Nigéria a de quoi susciter l’intérêt des constructeurs mondiaux.
Depuis 2014, une nouvelle politique a été mise en place pour relancer l’industrie automobile nigériane et réduire les importations de véhicules pour une facture dépassant les 6,5 milliards de dollars par an. Pour pousser les constructeurs à s’implanter, les autorités ont mis en place des mesures douanières dissuasives avec une taxe fixée à 70% sur les voitures totalement fabriquées à l’étranger. De même, elles ont interdit les importations de véhicules de plus de 15 ans.
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Avant la mise en place de cette politique, le Nigéria comptait 15 usines d’assemblage dont 3 seulement fonctionnaient. En 2019, 25 unités de production fonctionnaient, avec toutefois des montages d’un nombre globalement négligeable d’unités.
Parmi les constructeurs implantés figure les japonais Honda (qui y produit un millier de véhicule par an) et Toyota, les français PSA qui fait son retour (PSA, présent depuis une cinquantaine d’années au Nigéria où il dispose d’une unité de montage d’une capacité de 90.000 unités qui a été relancée) et Renault, l’allemand Volkswagen, l’américain Ford avec une unité de montage de pick-up d’une capacité de 5.000 unités, l'indien Tata,...
L’homme le plus riche d’Afrique, Aliko Dangote, a aussi lancé une unité de montage de véhicules poids lourds. Avec un investissement estimé à plus de 100 millions de dollars, le projet, initié en partenariat avec le chinois Sinotruck, vise la production de 10.000 camions par an et la création de 3.000 emplois. Ce projet va éviter au Nigéria d’importer des véhicules lourds, mais aussi permettre d’approvisionner les pays de la sous-région en camions.
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Le seul type d’assemblage réalisé au Nigéria consiste au montage de kits automobile pré-assemblés SKD (semi knocked down).
En plus du montage des marques étrangères, le groupe nigérian Innoson Vehicle manufacturing (IVM) conçoit et assemble une large gamme de véhicules. Lancée en 2010 par Innocent Chukwuma, après le succès du montage de motos Innoson lancées en 2000, le constructeur nigérian produit des camionnettes, des véhicules utilitaires, des véhicules particuliers et des bus. Le groupe produit jusqu’à 4.000 unités par an. Il produit également des pneus et utilise de nombreux composants locaux. Le châssis et le moteur sont importés.
Les autorités nigérianes ont décidé de soutenir cette production locale en s’approvisionnant auprès des unités de montage déjà implantées dans le pays.
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En dépit de son potentiel, le Nigéria a du mal à donner une véritable impulsion à son industrie automobile. La production ne suit pas sous l’effet de nombreux difficultés: capacité électriques insuffisantes, faible formation des ressources humaines, absence d’équipementiers et de fournisseurs de pièces automobiles…
Côte d’Ivoire: démarrage de la production de minibus et d’autres projets dans le pipe
La Côte d’Ivoire a enregistré, le 10 janvier 2022, la sortie des premiers minibus de l’unité d’assemblage de Sotra Industries, les premiers véhicules de ce type montés dans le pays. Fruit d’une joint-venture entre le groupe Iveco, constructeur de véhicules industriels et de bus, du groupe italo-américain CNH Industrial, qui détient 40% du capital, et la Société de transport abidjanais (Sotra), il s’agit d’unité d’assemblage de minibus en Afrique de l’Ouest.
Implantée à Koumassi, dans le sud d’Abidjan, l’unité est dotée d’une capacité de 500 unités par an au démarrage, soit 2 à 3 unités par jour. La cadence devrait monter en puissance pour atteindre 1.000 unités à partir de la 3e année de production.
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Cette production est destinée, dans un premier temps, à l’approvisionnement du marché local ivoirien. Et dans une seconde étape, la joint-venture cible le marché du transport urbain ouest-africain.
Cette première unité d’assemblage signe le retour de la construction automobile en Côte d’Ivoire après une longue parenthèse. En effet, le constructeur français Renault était implanté en Côte d’Ivoire dans les années 1970, avant de mettre fin à cette unité de montage au milieu des années 1980. Elle rentre dans le cadre de la politique d’industrialisation et de diversification de l’économie ivoirienne.
A ce titre, il faut souligner souligner que l’Etat ivoirien et le constructeur japonais Toyota ont signé en août 2019 à Yokohama, un accord portant sur la création d’une unité de montage de véhicules de la marque nippone, qui détient une part de marché de 50% en Côte d’Ivoire.
De même, le constructeur français Renault envisage l’implantation d’une petite unité d’assemblage automobile en Côte d’Ivoire.
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Globalement, les constructeurs mondiaux sont intéressés par des implantations d’unités de montage automobile en Afrique de l’Ouest pour plusieurs raisons. D’abord, il s’agit d’un marché à fort potentiel avec une population de plus de 420 millions d’habitants, soit le tiers de la population africaine, et qui concentre des pays à fort potentiellement de croissance grâce aux découvertes de pétrole et de gaz dans de nombreux pays de la sous-région. Ensuite, avec près de 2% du parc automobile mondial et un taux de motorisation de 44 voitures pour 1.000 personnes, contre 661 en Amérique du Nord et 569 au sein de l’Union européenne, l’Afrique demeure sous-motorisée et constitue une opportunité pour les constructeurs automobiles.
Ensuite, ces implantations visent à combattre les importations massives de véhicules d’occasion qui inondent la région. En effet, plus de 8 véhicules sur 10 roulant au niveau de la région sont des occasions. Ainsi, en investissant dans les unités de montage, les constructeurs obligent les Etat à limiter les importations de véhicules d’occasion. En conséquence, de nombreux pays de la région, pour attirer les constructeurs mondiaux, ont réduit l’âge des véhicules d’occasion à importer à 5 ans. C’est le cas de la Côte d’Ivoire qui a décidé depuis 2018 d’interdire l’importation de véhicules d’occasion de plus de 5 ans d’âge. Une mesure qui a contribué à la dynamisation du marché de véhicules neufs dont les ventes ont augmenté de 57% en 2021.
Par ailleurs, les pays de la région essaient d’attirer les constructeurs internationaux afin de pouvoir tirer profit de la Zone de libre-échange continental africain (Zlecaf), une fois celle-ci effective.
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Reste que les taux d’intégration automobile au niveau des pays de la région ouest-africaine sont négligeables du fait de la quasi absence d’équipementiers et de fournisseurs automobiles dans la région, à quelques exceptions au Nigéria et au Ghana. Or, la présence de ceux-ci est essentielle pour apporter de la valeur ajoutée aux unités de montage locales, sinon l’impact économique de celles-ci sera plus que négligeable. La valeur ajoutée de la fabrication via les importations de kits (SKD et CKD) est anecdotique et les volumes des unités montées dans les usines rendent souvent improbables les investissements dans la fabrication de composants, sans lesquels il sera impossible d’accroître le taux d’intégration locale.
En plus, il es urgent d’accorder une importance accrue à la formation professionnelle au niveau du secteur automobile afin d’accompagner son développement au niveau de la région. De même, afin de faciliter les ventes de véhicules montés localement, il est impératif que les banques adaptent leurs offres de financement pour pousser les populations à acquérir des voitures neuves à des coûts moindres.