Aliou Mahamar Touré avait été arrêté en décembre 2013 au cours d'une opération des forces armées maliennes, contre lesquelles il avait riposté à l'arme à feu. Il est notamment accusé d'avoir coupé une main à des voleurs présumés et fouetté en public des femmes qui ne portaient pas le voile islamique.
L'Association malienne de défense des droits de l'homme (AMDH) et la Fédération internationale des ligues des droits de l'Homme (FIDH) "espèrent" que son procès débouchera sur "un jugement reconnaissant l'ampleur et la gravité des crimes" commis par les jihadistes.
Mais elles se sont dites "inquiètes" que "l'ordonnance de renvoi" contre Touré "ne mentionne pas les crimes de guerre et torture", ne retenant, selon elles, que des "coups et blessures aggravés".
Le procès a démarré dans la matinée devant une salle comble située dans les bâtiments de la Cour d'appel de Bamako, a constaté un journaliste de l'AFP.
Il "m'a coupé la main"
Au moins huit de ses victimes présumées étaient présentes à l'audience. "Je suis chauffeur. Aliou m'a coupé la main droite alors que je n'ai rien fait", a déclaré une de ces victimes. "Je veux que la loi le frappe".
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Originaire de Gao, Aliou Mahamar Touré était un pilier du Mouvement pour l'unicité et le jihad en Afrique de l'Ouest (Mujao), un des groupes jihadistes qui a occupé le nord du Mali en 2012.
Reconnaissable par sa grande taille et son véhicule pick-up qu'il conduisait lui-même, Touré, Malien le plus gradé dans les rangs des islamistes armés, était redouté par la population à Gao.
"Ici, c’est la charia (loi islamique) qu'il faut appliquer. C’est la loi de Dieu. Gao a quitté les mains de mécréants pour tomber dans les mains de Dieu. C’est au nom d'Allah que nous appliquons la charia", déclarait-il à l'époque à des journalistes de l'AFP.
Mausolées de Tombouctou
Le procès de Aliou Mahamar Touré débute au lendemain du jugement rendu par la Cour pénale internationale (CPI) déclarant un autre jihadiste malien, Ahmad al Faqi al Mahdi, coupable d'avoir provoqué pour 2,7 millions d'euros de dégâts en faisant détruire en 2012 des mausolées de la cité historique de Tombouctou (nord).
Ce Touareg né vers 1975 avait été condamné en septembre dernier à neuf ans de prison à La Haye pour avoir "dirigé intentionnellement des attaques" contre la porte de la mosquée Sidi Yahia et neuf des mausolées de Tombouctou, classés au patrimoine mondial de l'humanité par l'Unesco et détruits à coups de pioche, de houe et de burin.
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De mars 2014 à juillet 2015, des travaux de reconstruction ont été réalisés dans le cadre d'un programme mis en oeuvre par l'Unesco. En février 2016, la cité a repris possession de ses sanctuaires reconstruits à l'identique.
Le nord du Mali était tombé en mars-avril 2012 sous la coupe de groupes jihadistes liés à Al-Qaïda à la faveur de la déroute de l'armée face à la rébellion à dominante touareg, d'abord alliée à ces groupes qui l'ont ensuite évincée.
Ces groupes en ont été en grande partie chassés à la suite du lancement en 2013, à l'initiative de la France, d'une intervention militaire internationale, qui se poursuit actuellement.
A nouveau touché lundi par plusieurs attaques contre des camps de l'ONU, malgré un accord de paix signé en 2015, le Mali a réclamé devant le Conseil de sécurité une aide matérielle et financière pour contribuer à la création par cinq pays du Sahel d'une force militaire conjointe.
Cette force de quelque 5.000 hommes devrait être opérationnelle à l'automne mais son financement est encore loin d'être assuré, malgré l'engagement pris par la France et l'Allemagne d'élargir leur soutien à sa création.