Alors que la pénurie d’huile n’est pas encore circonscrite, malgré les effets d’annonce du gouvernement sur une prétendue production d’huile de table largement supérieure à la demande, accusant, du coup, les commerçants d’être des spéculateurs à la solde des ennemies du pays, voilà que le lait, un autre produit de première nécessité, se fait très rare dans de nombreuses régions en Algérie. Et ce n’est pas une première, les Algériens commencent même à s’en habituer au cours de ces dernières années.
Ainsi, à Mostaganem et ses communes avoisinantes, les citoyens sont confrontés à une perturbation chronique dans la distribution du lait en sachet à 25 dinars, un produit largement consommé par les ménages à faibles revenus.
«Il y a des chefs de famille qui, tôt le matin, guettent les arrivées des camions de livraison de lait pour se ruer ensuite vers les magasins, provoquant un brouhaha indescriptible», souligne Le Soir d’Algérie. Et, du coup, les quantités livrées sont rapidement épuisées par la forte demande de la population.
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Face à cette situation de pénurie du lait en sachet, les commerçants en profitent pour écouler d’autres produits laitiers. «Le matin, quand le lait subventionné est disponible, il est vendu en concomitance avec l’obligation de prendre pour chaque 2 sachets de lait, un litre de lait de vache à 65 dinars ou du lait caillé», ajoute le quotidien algérien.
Seulement, au niveau des laiteries, on continue à soutenir les annonces des autorités en avançant que la production est suffisante face à la demande, alors qu’en réalité, c'est loin d'être le cas pour celle-ci. Et pour cause, la production des laiteries algériennes dépend en grande partie des importations de lait en poudre. Un produit que les autorités ont suspendu l’importation en septembre dernier, poussant les producteurs de lait algérien à ralentir leur production faute de matière première.
Du coup, les producteurs laitiers aussi préfèrent orienter leur production vers les produits apportant plus de profits. Ainsi, certains producteurs délaissent le lait en sachet subventionné à 25 dinars pour produire exclusivement le lait de vache écoulé à 65 dinars.
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Outre le lait en sachet, le lait conditionné en boite connait lui aussi une grave pénurie. Une pénurie qui était prévisible, selon les professionnels du secteur qui ont alerté les autorités lorsque celles-ci ont pris la décision de suspendre les dérogations sanitaires pour l’importations de la poudre de lait (DSI).
Seulement, les autorités algériennes, ayant pour seule politique la préservation des réserves en devises, avaient décidé de ne pas répondre aux demandes d’importations de poudre de lait dès juillet 2021. Une situation qui a poussé les producteurs de lait conditionné à recourir à leur stock stratégique qui s’est finalement épuisé. Et les autorités ont attendu la fin du mois de décembre 2021 pour délivrer ces DSI. Pis, selon Faouzi Berkati, PDG du groupe Tchin-Lait qui produit le lait en brique «Candia», dans Algérie-éco, «au mois de décembre, ils nous avaient autorisés à importer de pays lointains, tels que la Nouvelle-Zélande, l’Uruguay et l’Australie, ce qui allait retarder l’opération d’importation de la poudre de lait à plus de quatre mois», alors que, ajoute-t-il, «les délais d’importation à partir de pays européens, sont plus courts. Il faut compter un mois et demi, le temps de commander la marchandise, de l’acheminer vers l’Algérie ainsi que les procédures administratives».
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La situation des producteurs algériens est d’autant plus compliquée qu’ils ont été obligés par les autorités algériennes de rompre les contrats d’achat signés en octobre 2021 avec leurs fournisseurs après la décision des autorités algériennes d’interdire l’importation du lait en poudre. Du coup, les fournisseurs européens ont été obligés de fournir leurs produits à d’autres clients. Et, entre temps, les prix mondiaux du lait ont fortement augmenté de 30%. Et renouer avec leurs fournisseurs risque de prendre du temps et inscrire la pénurie du lait dans la durée.
Pourtant, les professionnels du secteur avaient clairement averti les autorités de l’impact négatif de l’interdiction de l’importation du lait en poudre sur l’industrie locale. Pour avoir une idée claire de la dépendance de l’Algérie du lait en poudre, il faut souligner qu’en 2018, le pays était el 3e importateur mondial de produits laitiers derrière la Chine et le Mexique. Et ces produits représentaient 16% de la facture des importations alimentaires du pays. Durant cette année, l’Algérie avait importé 270.000 tonnes de poudre de lait entier et 166.000 tonnes de poudre de lait écrémé pour répondre à la demande locale. En 2019, ce sont 232.000 tonnes de lait entier en poudre et environ 167.000 tonnes de poudre de lait entier qui ont été importés pour une facture de 1,25 milliard de dollars.
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Sachant que l’Algérien est l’un des plus grands consommateurs de lait au monde avec une moyenne de 167 litres/an par habitant, contre une moyenne mondiale de 87 litres/habitant/an, on comprend l’ampleur d’une pénurie sur la population. En tout, le pays consomme autour de 6 milliards de litre-équivalent lait/an alors que la production locale peine à atteindre 2 milliards de litres, soit un déficit de plus de 4 milliards de litres de lait.
Dans ces conditions, interdire l’importation du lait revient tout simplement à priver la population d’une denrée de première nécessité.
Mais, pour les autorités, la véritable priorité est la préservation des réserves en devises du pays qui sont passées de 194 milliards de dollars en 2014 à hauteur de 40 milliards de dollars, selon les estimations des autorités algériennes, actuellement et ce, grâce aux interdictions d’importations de nombreux produits dont la liste a été allongée à plus de 2.600 produits. Du coup, l’inflation et les pénuries se multiplient au moment où les autorités se glorifient d’avoir rehaussé le niveau de leurs réserves qui étaient tombées à hauteur de 30 milliards de dollars, sans se soucier des conséquences de cette politique d’interdiction tous azimuts des importations.