​Algérie. La presse s'interroge: "et maintenant?"

Le duo Bedoui et Lamamra peinent à recruter les ministres de leur gouvernement. . DR

Le 18/03/2019 à 12h52, mis à jour le 18/03/2019 à 13h00

Revue de presseLe tandem Noureddine Bedoui et Ramtane Lamamra n'a toujours pas formé de gouvernement et depuis leur nomination, la rue les a désavoués, et les politiques ne veulent pas s'afficher avec eux. Que compte réellement faire le pouvoir, à présent?

"Et maintenant?", s'interroge El Watan dans un article intitulé "Le plan de Bouteflika rejeté massivement". Selon le quotidien algérien, les regards sont aujourd'hui tournés vers les sièges de la Présidence à El Mouradia et de la Primature, en quête de réponses qui tardent à venir. 

En effet, la rue a massivement rejeté la proposition de l'entourage de Bouteflika, qui consiste à prolonger sine die l'actuel quatrième mandat de Bouteflika, tout en appelant les forces vives de la nation au dialogue.

Par conséquent, le Premier ministre, Noureddine Bedoui, et son adjoint, Ramtane Lamamra, ont été désavoués de même que leurs mentors que sont Bouteflika et Ahmed Gaïd Salah. 

"Que diront les tenants du régime?", se demande toujours El Watan. "Continueront-ils à faire la sourde oreille et poursuivre la mise en oeuvre de la feuille de route dévoilée lundi 11 mars?"

Pour le moment, trois jours après la sortie de millions d'Algériens dans les rues du pays, les responsables font comme si la manifestation de vendredi n'avait pas eu lieu. Peut-être que Bedoui et Lamamra ont-ils perdu la voix, à cause du coup porté par cet "assommoir populaire"? 

La tâche est d'autant plus ardue pour le Premier ministre Bedoui et son adjoint qu'aucun parti de l'opposition n'est favorable à ce dialogue auquel appelle le pouvoir.

Politiques, syndicats et société civile, tous appellent dans un bel ensemble au départ de Bouteflika et à la mise en place d'un gouvernement d'Union nationale, pour l'organisation de l'élection présidentielle. 

Louisa Hanoune, du Parti des Travailleurs, estime ainsi que "la conférence nationale à laquelle appelle Bouteflika ne sera ni souveraine ni constituante". Ali Benflis, candidat s'était retiré avant l'annulation de l'élection "exige" quant à lui "le départ de Bouteflika". 

Actuellement, le pouvoir Algérien est seul, puisque son appel n'a trouvé écho ni auprès de la rue ni dans l'opposition, et encore moins auprès de la société civile. 

Le politologue libanais Antoine Basbous, cité par Le Parisien, et repris par El Watan, affirme que "l'enfumage n'a pas marché".

Noureddine Bedoui, Ramtane Lamamra et Lakhdar Brahimi, qui s'exprimaient en conférence de presse, jeudi dernier, étaient à court d'arguments, et pour Antoine Basbous, "personne dans la majorité n'est venu à leur secours: ça ne va pas fort". 

"Si Bouteflika reste au pouvoir comme il entend le faire après le 28 avril, terme de son mandat, alors les choses s’envenimeront forcément", prévient Basbous.

Selon ce politologue, "la fin de la partie sera peut-être sifflée par l’armée. Elle ne semble pas prête à s’engager dans une bagarre pour soutenir un homme qui ne représente plus ni le présent ni l’avenir du pays, et qui est en train de s’effacer biologiquement", tranche-t-il. 

Quoi qu'il en soit, ce "non" franc et massif de la rue et de l'opposition s'est traduit par les difficultés qu'ont Bedoui et Lamamra à former un gouvernement, plus d'une semaine après leur nomination.

"Est-il à ce point difficile de trouver des «clients» pour cette opération d'offre publique de maroquins à la criée", s'interroge à ce titre, non sans ironie, le site d'information Algérie 1.

Ce même média se demande "où sont donc ces têtes d’affiches qui devraient sauver les apparences réformistes d’un pouvoir pris en flagrant délit de hors-jeu".

Et d'ajouter: "il est loisible de deviner l’insoutenable gêne de Bedoui mais surtout de Lamamra de vendre des portefeuilles ministériels à des personnalités au-dessus de tout soupçon pour servir de béquilles politiques à un régime qui a les jambes sciées par l’insurrection citoyenne". 

Algérie 1 laisse même entendre que les personnalités sollicitées pour faire partie du gouvernement en ont décliné l'offre. "Si, avant, les places étaient si chères au gouvernement et faisaient saliver d’envie du beau monde, ce n’est plus le cas aujourd’hui". 

Il reste une ultime question, celle de savoir si Bedoui et Lamamra réussiront à trouver des acteurs crédibles qui accepteront la compromission qui leur est démandée par la participation dans un gouvernement que la rue algérienne a, d'ores et déjà, désavoué, un gouvernement qui cessera d'être légal dès le 28 avril prochain, soit la date de la fin du quatrième mandat de Bouteflika. Le compte à rebours est enclenché. 

Par Mar Bassine Ndiaye
Le 18/03/2019 à 12h52, mis à jour le 18/03/2019 à 13h00