Maroc, Egypte et Tunisie: fortes hausses des arrivées et des recettes touristiques

Le 11/06/2023 à 09h38

Les arrivées de touristes sont en fortes hausses durant les premiers mois de l’année 2023 au niveau des principaux pays touristiques de l’Afrique du Nord -Egypte, Maroc et Tunisie-, avec des croissances fortes comparativement à la même période de 2019. Les recettes touristiques sont également en fortes augmentations. Des performances qui augurent une année touristique 2023 record, à condition qu’autorités et professionnels du secteur puissent s’adapter à l’embellie et répondre aux défis posés en matière d’hébergement et de transport.

La reprise du tourisme se confirme au niveau de la région Afrique du Nord, Egypte comprise. Les arrivées de touristes sont sur un bon trend haussier. Aux termes des 5 premiers mois de 2023 (4 mois pour l’Egypte), tous les indicateurs touristiques sont bien orientés et laissent à penser que les trois pays (Maroc, Tunisie et Egypte) seraient en mesure d’atteindre des performances touristiques historiques cette année. Tout laisse entrevoir que ces performances seront excellentes durant la période estivale qui démarre, et ce au vu des résultats enregistrés au cours de ces deux derniers mois au niveau de la région.

Au Maroc, selon les données du ministère du Tourisme, de l’artisanat et de l’économie sociale et solidaire, à fin mai 2023, le nombre de touristes ayant visité le pays s’est établi à 5,1 millions. Un volume en hausse de 20% par rapport à la même période de 2019, année de référence du secteur touristique mondial. Avec 1,1 million d’arrivées durant le mois de mai 2023, en hausse de 55% par rapport à mai 2019, la période estivale s’annonce prometteuse.

Les arrivées de touristes ont été portées par les excellents comportements de nombreux marchés émetteurs : l’Espagne (+46%), le Royaume-Uni (+29%), Israël (+158%) et l’Italie (10%).

Parallèlement, à fin avril 2023, les recettes touristiques se sont établies à 32 milliards de dirhams (soit 3,18 milliards de dollars), en hausse de 40%, comparativement à la même période de 2019, dans le sillage des arrivées de touristes. Outre la hausse des arrivées, la hausse des recettes s’explique aussi par les augmentations des prix pour compenser l’inflation du moment.

Ces performances s’expliquent par plusieurs facteurs : la reprise du tourisme mondial, les impacts positifs du plan d’urgence de 2 milliards de dirhams mis en place par le gouvernement en 2022 pour soutenir les professionnels, les politiques de promotion de la destination Maroc, l’amélioration de la connectivité aérienne, les retombées positives de la belle épopée des Lions de l’Atlas au Mondial qatari…

Au même titre que le Maroc, la Tunisie a vu ses principaux indicateurs évoluer positivement. A fin mai dernier, le pays a accueilli 3 millions de touristes, soit un bond de 89% par rapport à la même période de l’année précédente.

Parallèlement à la hausse des arrivées, les recettes touristiques ont aussi fortement augmenté au terme des cinq premiers mois de l’année, avec une progressant de 57,7% à 550 millions de dollars, selon les données de l’Office national du tourisme tunisien.

Bien qu’ayant accueilli l’équivalent de 59% des arrivées touristiques au Maroc, les recettes générées par le secteur touristique tunisien ne représentent que 17,30% de ceux du Maroc. Une situation qui s’explique essentiellement par le fait que la Tunisie, contrairement au Maroc, a opté pour le tourisme de masse. Le pays mise sur un rapport qualité/prix attractif sur le segment balnéaire face à des concurrents comme la Turquie et la Grèce qui ont très fortement augmenté leurs prix cette année.

Du côté de l’Egypte, les données disponibles se rapportent seulement au 4 premiers mois de l’année en cours et portent uniquement sur les arrivées. Selon les données distillées par le ministre égyptien du Tourisme et des Antiquités, Ahmed Issa, les arrivées se sont établies à 4,5 millions de visiteurs. En avril, le pays a accueilli 1,35 million de touristes, un niveau record dans l’histoire touristique égyptienne qui augure de bonnes perspectives pour la période estivale.

Avec les performances réalisées durant les 4 premiers mois de l’année, le pays est sur une bonne trajectoire pour atteindre l’objectif de 15 millions de touristes au titre de 2023, contre 11,7 millions de touristes en 2022, soit une hausse projetée de 28%. «Cette année promet d’être un record historique pour le tourisme en Egypte», anticipe le ministre égyptien.

Les performances touristiques réalisées par les trois pays nord-africains augurent de perspectives record au terme de l’année en cours, si bien sûr aucun évènement exceptionnel ne vient perturber l’environnement national et international. L’Egypte, le Maroc et la Tunisie ambitionnent de battre leurs records de visiteurs de respectivement de 14,7 millions de visiteurs (2010), de 13 millions d’arrivée en 2019 et 9,43 millions de touristes en 2019.


Arrivées et recettes touristiques à fin mai 2023

PaysArrivées de touristes à fin maiRecettes touristiques à fin mai
Maroc5,1 millions3,2 milliards de dollars
Tunisie3 millions0,55 milliards de dollars
Egypte4,5 millions (*)nd

(*) Données à fin avril 2023

Toutefois, si ces performances pré-estivales laissent entrevoir de bonnes perspectives touristiques au titre de 2023, il faudra aussi que les trois pays relèvent certains défis pour tirer pleinement profit de l’embellie actuelle. Quelques défis risquent de se poser aux professionnels et autorités en charge de la gestion du secteur.

D’abord, le nombre croissant d’arrivées de touristes pose aussi des problèmes d’hébergement des touristes pour certaines destinations privilégiées des visiteurs, et ce d’autant plus que durant la période de la crise sanitaire de 2020 et 2021, les professionnels, frappés de plein fouet par la crise du Covid-19 et son impact sur leurs activités, n’ont pas pu réaliser les investissements nécessaires en matière de nouvelles capacités, de rénovation et d’amélioration de la qualité des services. Or, une hausse importante des arrivées dans certaines destinations entraine une certaine saturation poussant certains professionnels à user de la variable prix pour tirer profit de la situation favorable, avec le risque de porter préjudice à la destination, sachant que la reprise reste encore fragile. A ce titre, en Egypte, le ministre du Tourisme a tiré la sonnette d’alarme en soulignant que le pays devrait doubler sa capacité de chambres d’hôtels en la faisant passer de 230.000 actuellement à 500.000 chambres d’ici 5 ans afin de pouvoir héberger les touristes étrangers.

Au Maroc, le Plan d’urgence de 2 milliards de dirhams mis en place en 2022 a aidé à la mise à niveau de l’offre hôtelière. Toutefois, pour répondre aux ambitions du Royaume dans les années à venir, avec l’objectif de 17,5 millions de touristes en 2026, il faut investir davantage dans les capacités et les services.

Par ailleurs, il y a surtout le problème de transport qui se pose avec beaucoup d’acuité dans presque toutes les destinations nord-africaines, et ce malgré l’open sky dans le cas de Maroc et les nombreux avantages octroyés par l’Egypte aux transporteurs pour les encourager à desservir le pays. D’ailleurs, les tour-opérateurs craignent de ne pas disposer de capacité aérienne suffisante cet été pour répondre à la demande sur la destination Afrique du Nord. En Tunisie par exemple, les compagnies Tunisair et Nouvelair tourneront à plein régime.

Ce problème de connexions aériennes concerne toutes les destinations de la région, à des degrés différents bien évidemment. Sur ce point crucial pour maintenir la cadence des arrivées de touristes, tous les pays de la sous-région doivent relever ce défi du renforcement des liaisons aériennes avec les principaux pays émetteurs de touristes. A ce titre, au Maroc, on table sur l’ouverture de 35 nouvelles lignes desservant 8 destinations marocaines. En février dernier, le PDG de Tunisair, Khaled Chelly, soulignait que, dans le cadre de la préparation à la nouvelle saison touristique «qui s’annonce excellente», la flotte de la compagnie devrait atteindre 17 appareils, contre 12 disponibles.

Enfin, le défi des ressources humaines de qualité ne doit pas être négligé dans un contexte de hausse des arrivées. Malheureusement, après deux années de Covid-19, le secteur manque relativement de ressources qualifiées. En Tunisie par exemple, la situation dans certains hôtels a été tel que certains hôteliers ont été obligés de rappeler des retraités afin qu’ils encadrent et soutiennent les nouvelles recrues.

Par Moussa Diop
Le 11/06/2023 à 09h38