Covid-19. Afrique: face aux réticences vis-à-vis des vaccins, certains pays recourent à la vaccination obligatoire

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Le 14/08/2021 à 13h06, mis à jour le 14/08/2021 à 13h09

Face à la 3e vague de contagion engendrée par variant Delta et à la réticence des populations vis-à-vis des vaccins anti-Covid-19, plusieurs pays africains tentent de rendre obligatoire la vaccination pour certaines catégories professionnelles. Des décisions loin de faire l’unanimité. Explications.

L’Afrique fait face à la 3e vague de contagion au Covid-19 sous l’effet du variant «Delta» qui fait des ravages dans de nombreux pays africains, en dépit des statistiques relativement rassurantes de certains pays. La hausse des enterrements enregistrée dans les cimetières en contradiction avec les chiffres officiels de nombreux pays du continent illustrent bien les ravages du coronavirus en Afrique.

Seulement voilà, outre l’accès aux vaccins qui demeure encore problématique pour de nombreux pays, plus grave encore est qu’une part encore importante de la population africaine est réticente à la vaccination. Outre les accusations portant sur des tentatives d’empoisonnement et de stérilisations déguisées des Africains, ces réticences face aux vaccins sont alimentées aussi par les complotistes.

Conséquence, à peine 1,7% de la population africaine est aujourd’hui vaccinée contre le Covid-19, alors que dans le monde, 4,66 milliards de doses ont été administrées et 1,82 milliard de personnes ont été totalement vaccinées.

Cette situation et à la réticence des populations africaines aux vaccins en général et à ceux contre le Covid-19, en particulier, pousse certains pays du continent à détruire les faibles doses obtenues fautes de candidats aux vaccins, les dirigeants de nombreux pays africains semblent s’orienter vers l’obligation de vaccination des populations, ou, au moins, pour certaines catégories socio-professionnelles.

L’objectif est de pousser une partie importante de la population vers les centres de vaccination. Et, à ce titre, plusieurs pays ont d’ores et déjà annoncé l’obligation de vaccination des fonctionnaires. D’autres incluent aussi les étudiants, le personnel soignant et certaines catégories socio-professionnelles.

C’est le cas de la République du Congo. Dans ce petit pays d’Afrique centrale de moins de 6 millions d’habitants, la vaccination est obligatoire depuis le 6 juillet dernier pour au moins 4 catégories socio-professionnelles: soignants, étudiants, fonctionnaires et personnels des ministères.

Cette décision a été prise par les autorités du fait de la faiblesse du nombre de personnes vaccinées. Le pays compte en tout moins de 80.000 personnes totalement vaccinées contre le Covid-19, soit moins de 2% de la population. Cette décision a été prise afin d’éviter que les vaccins dont dispose le pays ne soient jetés après leurs dates de péremption. En effet, plus de 100.000 doses offertes par la Chine n’avaient pas trouvé preneurs du fait de la réticence des populations à se faire vacciner.

Cette décision de rendre obligatoire la vaccination est toutefois loin de faire l’unanimité. Bertrand Meunier, coordinateur du mouvement «Ras-le-bol», expliquait sur la chaîne TV5 Afrique que cette décision «viole la liberté fondamentale», ajoutant qu’«on ne peut pas imposer quelqu’un d’inoculer une substance dont il ne connait pas les tenants et aboutissants», allant jusqu’à assimiler l’obligation de la vaccination à la «dictature».

Idem au Kenya où les autorités ont déclaré obligatoire la vaccination des fonctionnaires. Ces derniers ont jusqu’à fin août courant pour se faire vacciner contre le Covid-19. Passé ce délai, selon le directeur des services publics, Joseph Kinyua, ceux qui n’auront pas reçu leur première dose de vaccin d’ici le 23 août seront considérés «comme des dossiers disciplinaires et des actions appropriées seront prises contre eux». La décision de rendre obligatoire la vaccination se justifie par le fait que celle-ci patine, avec moins de 3% des 47 millions de Kenyans vaccinés.

Outre l’obligation des fonctionnaires à se faire vacciner, le gouvernement kenyan a aussi interdit l’accès à certains lieux publics et privés aux personnes non-vaccinées afin de pousser la population à la vaccination.

Toutefois, cette décision de rendre obligatoire la vaccination est loin de faire l’unanimité. D’ailleurs, le Parlement a été saisi et doit trancher sur la question.

En Guinée Equatoriale, la vaccination est obligatoire depuis fin juillet dernier pour certaines professions dont les personnels de la santé, de l’enseignement, les forces de l’ordre, les militaires,… De plus, un certificat de vaccination est exigé pour accéder aux stades et à certains lieux publics.

En Mauritanie aussi, le gouvernement a pris un train de mesures draconiennes afin d’augmenter le nombre de personnes vaccinées. A ce titre, le gouvernement a annoncé, le mercredi 4 août, que la vaccination sera obligatoire pour tous les fonctionnaires et pour toutes les personnes qui travaillent dans les établissements publics et ce, afin de faire face à la hausse des contaminations au Covid-19. Parallèlement, les autorités ont lancé une campagne nationale de vaccination anti-Covid-19 visant à vacciner 300.000 personnes en une semaine.

Et selon Moktar ould Dahi, ministre de la Culture, de la Jeunesse, des Sports et des Relations avec le Parlement, les personnes réfractaires s’exposent à des sanctions.

Par ailleurs, le ministère du Transport a annoncé qu’à partir du lundi 16 août, la carte de vaccination sera obligatoire pour tous les chauffeurs de transport inter-urbain. Aucune autorisation de sortie d’une ville ne sera accordée à un chauffeur sans la présentation de sa carte de vaccination.

En clair, face à la méfiance des populations aux vaccins anti-Covid-19, les autorités prennent les devants craignant des arrivées soudaines et plus concentrées de malades gravement atteints dans les hôpitaux déjà saturés du fait des structures sanitaires défaillantes.

Par Moussa Diop
Le 14/08/2021 à 13h06, mis à jour le 14/08/2021 à 13h09