"Le président de la République, chef suprême des forces armées et ministre de la Défense, Abdelmadjid Tebboune, est rentré aujourd'hui au pays", a indiqué la chaîne publique TVA3 qui a diffusé des images de son retour.M. Tebboune n'a fait aucune déclaration. Ne portant pas de masque, il a salué debout et coude à coude les hauts responsables, dont le Premier ministre Abdelaziz Djerad et le chef d'état-major Saïd Chanegriha, venus l'accueillir dans un salon de l'aéroport militaire de Boufarik, près d'Alger.Hospitalisé pendant deux mois en Allemagne (28 octobre-29 décembre) après avoir contracté le Covid-19 à Alger, M. Tebboune, gros fumeur, a dû retourner le 10 janvier se faire opérer à Berlin à la suite de "complications" au pied droit. Il a été opéré "avec succès" le 20 janvier, selon la présidence qui n'a pas précisé la nature de ces "complications". Les séjours prolongés de M. Tebboune à l'étranger, trois mois en tout depuis le 28 octobre alors que l'Algérie traverse une crise sanitaire, politique et socio-économique, n'ont pas manqué de susciter des inquiétudes sur une éventuelle vacance du pouvoir."Réveillez-vous! Le président Abdelmadjid Tebboune est absent depuis un mois. Depuis la mi-octobre, il n'a passé qu'une douzaine de jours en Algérie. Aucun dirigeant, aucune institution ne s'inquiète de cette répétition de l'humiliant 4e mandat", a écrit sur Twitter le journaliste et analyste Abed Charef. Ce dernier faisait référence au quatrième mandat d'Abdelaziz Bouteflika, quand l'ex-président déchu, frappé par un AVC en 2013, était devenu impotent et aphasique.
- Remaniement -
Lors de son hospitalisation outre-Rhin, M. Tebboune a fait savoir qu'il suivait "quotidiennement, heure par heure, tout ce qui se passe en Algérie".Son absence est survenue dans un contexte de crispation du régime à l'approche du 2e anniversaire du soulèvement populaire inédit du Hirak, déclenché le 22 février 2019 et qui avait poussé M. Bouteflika à la démission deux mois plus tard.Parmi les dossiers prioritaires qui attendent M. Tebboune, la nouvelle loi électorale qui devra être présentée au Parlement en vue des scrutins locaux et législatif anticipés prévus en principe d'ici la fin de l'année.
Un remaniement du gouvernement serait également à l'ordre du jour.Le jour de son départ pour Berlin, M. Tebboune avait exprimé publiquement son insatisfaction devant l’action du gouvernement d'Abdelaziz Djerad, alimentant les rumeurs d'un prochain remaniement.Le chef d'Etat est également attendu sur la question mémorielle entre l'Algérie et la France, ancienne puissance coloniale. Le rapport de l'historien français Benjamin Stora, remis il y a près d'un mois au président français Emmanuel Macron, n'a toujours pas suscité de réaction officielle à Alger.
- A bout de souffle -
Arrivé au pouvoir le 12 décembre 2019 avec la volonté d'incarner "la nouvelle Algérie", M. Tebboune se trouve à la tête d'un pays dans l'impasse avec des institutions bloquées et une économie à bout de souffle.Le plus grand pays du Maghreb voit fondre ses réserves de change, tributaire des fluctuations des cours du marché pétrolier.Le retour de M. Tebboune intervient à dix jours du 2e anniversaire du Hirak, suspendue en mars 2020 en raison de la crise sanitaire.De nombreux opposants et militants du Hirak sont arrêtés, jugés et condamnés quotidiennement dans un climat de répression à l'encontre des opposants, des médias indépendants et des blogueurs. Selon le Comité national de libération des détenus (CNLD), une association de soutien aux prisonniers d'opinion, plus de 70 personnes sont actuellement emprisonnées en Algérie en lien avec les protestations du Hirak et/ou les libertés individuelles. Des poursuites fondées dans au moins 90% des cas sur des publications critiques envers les autorités sur les réseaux sociaux.