Transparence fiscale: le top 5 africain des réseaux d’échange de renseignements fiscaux

Les pays africains ont considérablement élargi leurs réseaux d’échange de renseignements (ER), avec 1849 relations bilatérales et régionales au 31 décembre 2023.. ©utah778 - stock.adobe.com

Le 10/06/2024 à 14h41

En 2023, les pays africains se sont fortement mobilisés pour faire progresser la transparence fiscale et l’échange de renseignements (ER) sur le continent, à travers l’Initiative Afrique. Cette initiative, lancée en 2014, vise à lutter contre l’évasion fiscale et les flux financiers illicites pour améliorer la mobilisation des ressources intérieures en Afrique.

L’évasion fiscale représente un fardeau colossal pour les économies africaines, grevant les ressources financières indispensables au développement socio-économique du continent. Dans ce contexte, l’expansion des réseaux d’échange de renseignements fiscaux s’impose comme une priorité stratégique pour lutter efficacement contre ce fléau. Selon le Rapport de progrès 2024 de l’Initiative Afrique, publié sous la responsabilité du Secrétariat général de l’OCDE, des progrès notables ont été accomplis, mais des défis majeurs subsistent.

Cette initiative, créée en 2014, vise à lutter contre l’évasion fiscale et les flux financiers illicites pour améliorer la mobilisation des ressources intérieures en Afrique.

Déploiement massif des accords d’échange

Selon le rapport, les pays africains ont considérablement élargi leur réseau d’échange de renseignements fiscaux, franchissant le cap des 1800 relations bilatérales et régionales en vigueur fin 2023. Les pays africains ont considérablement élargi leurs réseaux d’échange de renseignements (ER). Les chiffres sont éloquent à ce sujet. Au 31 décembre 2023, ils ont conclu 1.849 relations bilatérales d’ER basées sur des accords bilatéraux ou régionaux, qui prennent la forme de conventions de double imposition (CDI), d’accords d’échange de renseignements fiscaux (AERF) et d’accords régionaux, dont 1.347 sont en vigueur. L’adhésion croissante à la Convention concernant l’assistance administrative mutuelle en matière fiscale (MAAC) a joué un rôle catalyseur, offrant un accès privilégié à un vaste réseau de coopération fiscale multilatérale de près de 2800 relations via cet instrument juridique contraignant.

Parmi les leaders africains, l’Afrique du Sud, le Maroc, l’Égypte, la Tunisie et Maurice se distinguent, figurant au top 5 africain. Décryptage du top 5 continental.

L’Afrique du Sud, fer de lance des réseaux d’échange

Avec plus de 105 relations d’échange de renseignements en vigueur, l’Afrique du Sud se hisse au rang de leader sur le continent. Cette prééminence s’appuie principalement sur un vaste réseau de conventions de double imposition (CDI), comptant environ 80 accords bilatéraux.

Parallèlement, Pretoria a adhéré à des instruments régionaux clés, tels que l’accord sur l’assistance mutuelle de l’ATAF (AMATM) et la Convention multilatérale concernant l’assistance administrative mutuelle en matière fiscale (MAAC).

Le Maroc, l’autre plaque tournante

Avec près de 70 relations actives, le Maroc se positionne comme la deuxième plaque tournante africaine des échanges de renseignements fiscaux.

Là encore, les CDI constituent l’ossature de ce réseau, avec environ 65 accords bilatéraux. Cependant, le Royaume a également noué des partenariats régionaux stratégiques, en adhérant notamment à la convention fiscale de l’Union du Maghreb Arabe (UMA).

Sur la troisième et quatrième marche du podium, l’Égypte et la Tunisie affichent chacun un portefeuille de 60 relations d’échange de renseignements. Toutefois, des nuances apparaissent : si l’Égypte mise exclusivement sur les CDI bilatéraux, la Tunisie a diversifié ses canaux d’échange en adhérant également à l’accord régional de l’UMA.

Maurice, hub financier et passerelle stratégique

Complétant ce top 5 avec près de 55 relations, Maurice tire parti de son positionnement stratégique en tant que plaque tournante financière régionale. Outre un solide réseau d’une quarantaine de CDI, l’île a noué des accords d’échange de renseignements fiscaux (AERF) avec une dizaine de juridictions, renforçant ainsi sa

Malgré ces avancées prometteuses, plusieurs défis persistent. Tout d’abord, la conformité aux standards internationaux de transparence fiscale demeure partielle, avec seulement 50% des accords pleinement alignés. Ainsi, seuls 50% de ces accords sont pleinement conformes aux normes internationales, souligne le rapport.

comme indiqué plus haut, l’adhésion à la Convention concernant l’assistance administrative mutuelle en matière fiscale (MAAC) s’est avérée cruciale, facilitant l’accès à un vaste réseau de coopération fiscale. Au 31 décembre 2023, 20 pays africains avaient ratifié et mis en vigueur la MAAC, permettant à ces pays de bénéficier de 2800 relations d’ER via cet instrument multilatéral.

Infrastructures nationales

Les pays africains ont renforcé leurs cadres administratifs pour l’échange de renseignements (ER), avec 36 pays sur 41 ayant délégué les pouvoirs de l’autorité compétente à leurs administrations fiscales. Cependant, seuls 29 pays disposent d’une unité dédiée à l’ER, 25 ont documenté leurs processus et procédures, et 25 utilisent des outils de suivi. Les écarts persistent entre les membres et non-membres du Forum mondial, ainsi qu’entre les membres les plus anciens et les plus récents.

En 2023, les pays africains ont déployé 193 fonctionnaires pour la fonction ER, dont 70% entièrement dédiés à cette tâche. Parallèlement, 85 événements de formation interne ont permis de transférer des connaissances à 1691 agents fiscaux. Les pays ayant un niveau élevé de connaissances en ER sont généralement plus actifs dans ce domaine.

Des disparités régionales à combler

Malgré ces progrès notables, des défis majeurs persistent. Seuls 23 pays africains ont signé la MAAC, et 3 d’entre eux n’ont pas encore achevé le processus de ratification. De plus, les pays africains ont davantage de relations d’ER avec des juridictions extérieures au continent qu’entre eux.

Les relations d’échange demeurent majoritairement orientées vers des juridictions extérieures au continent africain, limitant les synergies régionales pourtant essentielles pour lutter efficacement contre les flux financiers illicites transfrontaliers.

Par Modeste Kouamé
Le 10/06/2024 à 14h41