Le détachement “(vient) de rentrer dans le camp à Kidal. Ils sont près de 300. Nous avons été escortés par les Casques bleus de l’ONU. Tout s’est vraiment bien passé”, a dit à l’AFP un commandant malien sous couvert d’anonymat.
L’information a été confirmée par la Minusma, la mission de l’ONU au Mali. Impliquée dans l’opération, elle a publié des photos d’une colonne de véhicules dans un paysage dénudé et poussiéreux à l’entrée de Kidal selon elle, après trois jours de piste au départ de Gao, environ 200 km au sud.
Dans un contexte de grave détérioration sécuritaire au Mali et au Sahel, le retour de l’armée nationale à Kidal, aujourd’hui sous le contrôle d’ex-rebelles touareg, est anticipé comme une affirmation forte d’une restauration de l’autorité de l’Etat malien, qui ne s’exerce plus sur de larges étendues du pays.
Il est aussi supposé donner l’exemple de la réconciliation dans le pays en guerre depuis 2012. Les unités entrées dans Kidal, dites “reconstituées”, comprennent d’anciens rebelles intégrés dans l’armée malienne conformément à l’accord de paix d’Alger de 2015.
Le retour de l’armée malienne à Kidal doit préluder au déploiement d’autres unités “reconstituées” à Ménaka, Gao et Tombouctou.
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La mise en oeuvre de l’accord d’Alger, avec ses dispositions pour l’intégration des ex-combattants, ainsi que le redressement de l’autorité de l’Etat sont considérés comme des composantes politiques indispensables à une sortie de crise, en plus de l’action purement militaire menée par les forces maliennes, françaises, africaines et onusiennes.
Le Mali est confronté depuis 2012 aux insurrections indépendantistes, salafistes et jihadistes et aux violences intercommunautaires qui ont fait des milliers de morts et des centaines de milliers de déplacés. Parties du nord du pays, les violences se sont propagées au centre et aux pays voisins, le Burkina Faso et le Niger.
Kidal, à 1.500 km au nord-est de Bamako, est le bastion culturel touareg et le berceau historique des clans les plus influents. C’est aussi une région qui a été marginalisée depuis l’indépendance malienne et où sont nées les différentes rebellions touareg.
Des mois de tractations
L’armée malienne n’y avait pas repris pied depuis mai 2014. Une visite du Premier ministre de l‘époque, Moussa Mara, avait donné lieu à des combats qui s‘étaient soldés par sa lourde défaite face aux rebelles.
Kidal est depuis contrôlée par la Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA), alliance à dominante touareg d’anciens groupes armés rebelles. La CMA est signataire de l’accord d’Alger de 2015 avec une alliance de groupes armés progouvernementaux, appelée la Plateforme.
Les conditions du déploiement des forces maliennes “reconstituées” à Kidal a fait l’objet de mois de négociations entre la CMA, l’Etat malien et les partenaires étrangers de celui-ci.
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L’accord final trouvé il y a quelques semaines prévoit le déploiement de 428 soldats: un tiers de soldats maliens, un tiers de combattants démobilisés de la CMA, un tiers d’anciens combattants de la Plateforme.
Yvan Guichaoua, chercheur à l’Université de Kent, souligne la portée du retour à Kidal.
“Il faut lever beaucoup d’obstacles symboliques pour créer la cohésion minimale requise pour former un front antiterroriste viable, et le retour des forces à Kidal prévu dans l’accord de paix faisait partie de ces obstacles”, explique-t-il à l’AFP.
Le situation de Kidal est aussi une source de fortes crispations pour les voisins du Mali qui y soupçonnent ou y dénoncent des alliances entre séparatistes et jihadistes. Pour eux, Kidal a servi de base arrière aux attaques jihadistes.
Kidal donne aussi lieu à des accusations contre la responsabilité imputée à la France, en raison de ses liens présumés avec les rebelles touareg, dans la situation particulière de la ville. Ces accusations apparaissent dans les discours hostiles à la présence française, de plus en plus audibles ces derniers mois.