Sénégal. "Démocratie hybride": Macky Sall justifie l'emprisonnement des activistes

Guy Marius Sagna devant le palais

Guy Marius Sagna devant le palais. DR

Le 02/02/2020 à 10h06, mis à jour le 02/02/2020 à 10h10

De démocratie imparfaite sous Abdoulaye Wade, le Sénégal de Macky Sall est passé au rang de "démocratie hybride", selon la dernière étude de "The Economist Intelligence". Une situation qui n’a pas échappé au président sénégalais qui a tenté, tant bien que mal, de se justifier.

Attaqué de partout, ces derniers mois, par les activistes dont l'un des plus médiatisés est en prison depuis de 2 mois, le président Macky Sall s’est exprimé sur la question, cette semaine.

Si le président sénégalais s'est décidé à parler de ce sujet génant, c'est parce qu'en janvier, The Economist Intelligence, dans son rapport consacré à la démocratie a constaté un très grand recul démocratique du pays de la Teranga qui a perdu 9 places, en une année, en passant de la 73e position mondiale en 2018 à la 82e en 2019. De "démocratie imparfaite", il est devenu "démocratie hybride", ce qui le classe parmi les régimes semi-dictatoriaux.

Selon lui, le gouvernement est loin de restreindre les libertés publiques comme le laissent certains. Il estime que la liberté d’expression est un principe qui ne souffre d’aucune restriction sauf si c’est l’ordre public qui est menacé ou encore la libre circulation des biens et des personnes.

Cette position du président Sall est souvent évoquée par les autorités administratives, notamment les préfets des départements, pour interdire les manifestations, ce que réfutent les activistes et l’opposition qui estiment que les forces de l’ordre déployées pour mater les manifestants auraient pu servir à encadrer les marches.

Pour ce qui concerne les manifestations, Macky Sall, chiffres à l’appui a fait savoir qu’«en 2018, sur 4828 demandes de manifester, seul 118 ont été interdites. Soit un taux de 2,44 %. Suffisamment préparé, le président Sénégalais ajoute qu’au troisième trimestre de 2019, sur 4444 déclarations seuls 71 n’ont pas été accordé soit un taux 1,71%».

Sauf qu'en réalité, ces chiffres ne disent pas quel est le nombre de manifestations qui correspondent à des fêtes de mariage, de baptême ou de danses populaires nocturnes que sont les "tan beer" dont les Sénégalais sont si friands.

Très attendu sur l’emprisonnement de Guy Marius Sagna, une question qu’il a toujours évitée, Macky Sall fait savoir que «lorsqu’ils déclarent une manifestation à la place de l’Indépendance ou devant le Palais de la République, c’est parce qu’ils ne veulent pas faire une manifestation pacifique, mais autrement les marches sont tolérées lorsque les initiateurs sont en conformité avec les autorités. Dans ce cas la police encadre la marche et les Sapeurs-pompiers sont derrière pour ceux qui sont fatigués », ajoute-t-il sur un ton ironique.

Cette sortie de Macky Sall devant ses militants a révolté les camarades de l’activiste qui ont réussi, ce vendredi 31 janvier, une très grande manifestation contre la hausse du prix de l’électricité. Une manifestation qui s’est finalement transformée en mobilisation pour la libération de Guy Marius Sagna, avec ses milliers de camarades qui réclamé sa libération.

Par Moustapha Cissé (Dakar, correspondance)
Le 02/02/2020 à 10h06, mis à jour le 02/02/2020 à 10h10