Cameroun: le patronat à couteaux tirés avec le Fisc

Célestin Tawamba, président du GICAM

Célestin Tawamba, président du GICAM. DR

Le 28/01/2020 à 08h45, mis à jour le 29/01/2020 à 08h25

Dans un courrier adressé au chef de l’État qui a fuité dans les médias, le président du Groupement inter-patronal du Cameroun évoque une rupture consommée des relations avec le directeur général des impôts, qui pourrait nuire au climat des affaires.

Les relations entre le Groupement inter-patronal du Cameroun (GICAM), qui regroupe l'essentiel des chefs des plus grandes entreprises du pays, et les services fiscaux se sont considérablement dégradées ces derniers jours. Notamment, suite à la divulgation dans les réseaux sociaux et dans les médias, d’un courrier à charge du président du GICAM, Célestin Tawamba, contre le directeur général des impôts (DGI) du pays, Mopa Fatoing.

Une note adressée au chef de l’État Paul Biya en personne. Dans sa missive datée du 16 janvier 2020, le président du GICAM reproche notamment au DGI «des faits porteurs de germes susceptibles de mettre à mal les relations entre l’État et le secteur privé et de compromettre irrémédiablement l'investissement et le développement des entreprises».

Et le GICAM de citer, entre autres, les relations difficiles entre le DGI et les entreprises, le climat «délétère» instauré à la DGI, le refus de délivrer des documents administratifs qui a entraîné des retards dans la réalisation des investissements, l'incapacité à concevoir une politique fiscale de nature à impulser la croissance tout en assurant un niveau appréciable de recettes à l’État, etc.

«L’attitude du directeur général des impôts a consisté de manière constante à chercher à porter atteinte à la crédibilité du patronat et à le faire apparaître sous un prisme déformant», peut-on lire dans l’adresse. Le GICAM critique également le DGI sur le fait qu’il considère les entreprises membres du GICAM comme «adeptes de la fraude et de l'évasion fiscale».

Une «aversion vis-à-vis du monde des affaires» qui, selon le patronat, se manifeste notamment par «des contrôles ciblés qui s’apparentent à de véritables règlements de compte et des redressements démesurés mettant en péril la survie de l'entreprise».

Aussi, face à cette rupture consommée des relations entre l’administration fiscale et les entreprises, le GICAM s’en remet-il à «la sagesse» du chef de l’État pour remédier à la situation. De son côté, le ministre des Finances, tutelle de la direction générale des impôts, a tenu à temporiser la situation.

«Le Cameroun est engagé dans un vaste projet de réformes visant à éradiquer la crise économique qui affecte la sous-région d’Afrique centrale. Entre autres, le gouvernement s’est engagé à maximiser le recouvrement des recettes non pétrolières afin d’être moins dépendant des ressources tirées du pétrole», indique Louis Paul Motaze dans un communiqué.

«Cet objectif de maximisation de recouvrement des recettes fiscales et douanières pouvant présenter un potentiel conflictuel avec les différents contribuables, le gouvernement s’est résolument engagé dans une perspective de dialogue permanent et fécond avec le secteur privé», ajoute le ministre.

Louis Paul Motaze cite diverses instances de dialogue entre le gouvernement et le secteur des affaires, notamment le Cameroon Business Forum, les rencontres entre son département ministériel et le secteur privé qui se tiennent chaque année avant la confection de la Loi de finances. Par ailleurs, cette année, à la faveur de la Loi de finances 2020, le gouvernement, comme mesure d’amélioration du climat des affaires, a consacré la médiation fiscale comme mode alternatif de règlement des litiges fiscaux. 

Par Patricia Ngo Ngouem (Yaounde, correspondance)
Le 28/01/2020 à 08h45, mis à jour le 29/01/2020 à 08h25