Burkina Faso: Blaise Compaoré «demande pardon» à la famille de Thomas Sankara et au peuple

L'ancien président burkinabè, Blaise Compaoré.

L'ancien président burkinabè, Blaise Compaoré. . DR

Le 26/07/2022 à 17h43, mis à jour le 26/07/2022 à 17h44

L'ancien président Blaise Compaoré, condamné par contumace à perpétuité pour l'assassinat en 1987 de son prédécesseur Thomas Sankara, a demandé «pardon» à la famille de ce dernier, mais aussi à l'ensemble du «peuple burkinabé» pour «les souffrances» endurées pendant ses 27 années au pouvoir.

«Je demande pardon au peuple burkinabè pour tous les actes que j'ai pu commettre durant mon magistère et plus particulièrement à la famille de mon frère et ami Thomas Sankara», indique l'ex-chef de l'Etat dans un message lu par le porte-parole du gouvernement burkinabè Lionel Bilgo.

«J'assume et déplore du fond du coeur, toutes les souffrances et les drames vécus par toutes les victimes durant mes mandats à la tête du pays et demande à leurs familles de m'accorder leur pardon», poursuit Compaoré.

Blaise Compaoré, 71 ans, était arrivé au pouvoir en 1987 à la faveur d'un putsch qui avait coûté la vie au président d'alors, Thomas Sankara, icône panafricaine aux idées «progressistes», dont il était un des proches amis avant qu'il ne soit tué.

En avril, le tribunal militaire de Ouagadougou l'avait été condamné par contumace à la prison à perpétuité pour son rôle dans cet assassinat, à l'issue d'un procès fleuve de six mois.

La mort de Thomas Sankara, qui voulait «décoloniser les mentalités» et bouleverser l'ordre mondial en prenant la défense des pauvres et des opprimés, a été un sujet tabou pendant les 27 ans de pouvoir de Compaoré.

«C'est une mascarade (...) une forme de diversion qu'il (Compaoré, ndlr) sème dans l'esprit des gens», a réagi Luc Damiba, secrétaire général du Comité international du mémorial Thomas Sankara, estimant que ces excuses sont formulées «pour lui permettre de rentrer au Burkina et avoir une grâce présidentielle».

Renversé par la rue en 2014, Blaise Compaoré vit depuis en Côte d'Ivoire, mais a pu faire un bref retour de quelques jours dans son pays, début juillet, sans être arrêté.

Dans son message, il a remercié le président ivoirien Alassane Ouattara d'avoir facilité ce retour.

"Union sacrée"

Il était invité par le lieutenant-colonel Paul-Henri Sandaogo Damiba, actuel président de transition arrivé au pouvoir lors d'un coup d'Etat en janvier, dans le but de «sceller la réconciliation nationale» avec d'anciens chefs d'Etat burkinabè face aux attaques jihadistes qui endeuillent le pays.

Après avoir rencontré le nouvel homme fort du pays, Compaoré était apparu amaigri à ses côtés.

Cette visite avait suscité une pluie de critiques au sein de la classe politique et de la société civile qui estimaient que la réconciliation ne devait pas être synonyme d'impunité.

Exprimant «sa profonde reconnaissance» aux autorités de transition Compaoré a appelé dans son message de mardi les Burkinabè «à une union sacrée, à la tolérance, à la retenue, mais surtout au pardon pour que prévale l'intérêt supérieur de la Nation».

«Notre pays, le Burkina Faso vit depuis quelques années l'une des crises les plus graves de son histoire qui le menace jusqu'à son existence même. Cette nation mérite mieux que le sort funeste que des terroristes veulent lui réserver», a-t-il poursuivi.

Compaoré est accusé d'avoir passé un pacte avec des groupes armés afin de préserver son pays des attaques jihadistes, lors de ses années au pouvoir.

Depuis sa chute en octobre 2014, le Burkina Faso s'est enfoncé dans une grave crise sécuritaire marquée par des attaques jihadistes meurtrières qui se multiplient, en particulier dans le nord et l'est du pays.

Le 24 janvier, le lieutenant-colonel Damiba avait renversé le président élu Roch Marc Christian Kaboré, rendu impopulaire par son «impuissance» face à l'insécurité.

Mais les putschistes ont été rapidement confrontés à leur tour à des attaques sanglantes, à l'image du massacre de 86 civils à Seytenga (nord) en juin.

Les violences, attribuées à des mouvements armés jihadistes affiliés à Al-Qaïda et au groupe Etat islamique, ont fait des milliers de morts et près de deux millions de déplacés au Burkina Faso depuis 2015.

Par Le360 Afrique (avec AFP)
Le 26/07/2022 à 17h43, mis à jour le 26/07/2022 à 17h44