Cameroun. Coronavirus: inquiétude grandissante dans les prisons

DR

Le 14/04/2020 à 12h15, mis à jour le 14/04/2020 à 13h15

Des détenus de la prison centrale de Yaoundé ont manifesté lundi 13 avril suite aux décès présumés liés au Covid-19 dans leur pénitencier. Un mouvement qui intervient au moment où le gouvernement est appelé à décongestionner les prisons pour éviter la propagation du virus.

Des détenus ont manifesté lundi 13 avril 2020 à la prison centrale de Yaoundé, la capitale, suite à une série de décès présumés liés au coronavirus (Covid-19), rapportent les médias locaux. Conçue pour 1500 prisonniers, la prison centrale de Yaoundé en compte plus de 5000 aujourd’hui, la majorité des personnes qui s’y trouvent étant en détention préventive, en attente de jugement.

Une surpopulation, couplée aux mauvaises conditions d’hygiène et à l’absence de précautions alimentaires nourrissent la peur de la contagion dans cette prison, comme dans les 90 autres que compte le pays. Fin mars, le Barreau du Cameroun a demandé aux autorités de prendre des «mesures fortes» dans les prisons pour éviter la propagation du coronavirus.

«Tant que le Cameroun n’arrive pas à la suspension des audiences criminelles et correctionnelles, à arrêter de faire les balades des détenus dans les cours de prison, à protéger le personnel pénitentiaire, et surtout, ne prend pas le décret des peines alternatives, nous considérons toujours que le lavage des mains, le nettoyage des vitres de séparation dans les parois, l’accès aux prisons qui est interdit aux proches des détenus, ne sont pas des mesures suffisantes aptes à garantir la santé des détenus qui est un devoir, une obligation de l’État du Cameroun», affirme Me Christian Daniel Bissou, président de la Commission des droits de l’Homme du Barreau.

De son côté, Human Rights Watch (HRW) a appelé le gouvernement camerounais à décongestionner les prisons, arguant que leur surpeuplement met les détenus en danger.

«Les autorités devraient remettre en liberté les prévenus dont la détention provisoire n’est pas absolument justifiée pour des raisons de sécurité publique, et mettre en place un système permettant d’envisager une libération anticipée ou une liberté surveillée pour les détenus les plus exposés au risque représenté par le virus, notamment les plus âgés et ceux dont l’état de santé rend le virus encore plus dangereux pour eux, ainsi que ceux qui sont détenus pour des infractions mineures. Sans cela, la santé – et la vie – de milliers de personnes seront en danger», affirme l’ONG de défense des droits humains.

S’inquiétant également des risques de contamination, l’ONU a appelé à la libération de détenus à travers le monde afin d’éviter que la pandémie de Covid-19 ne fasse des «ravages» dans les prisons surpeuplées.

«Les autorités devraient examiner les moyens de libérer les personnes particulièrement vulnérables au Covid-19, parmi eux les détenus les plus âgés et ceux malades, ainsi que les délinquants présentant un risque faible. (…)», selon la Haut-commissaire aux droits de l’Homme de l’ONU, Michelle Bachelet.

Plusieurs pays ont pris des initiatives dans ce sens, comme le Kenya et le Nigeria en Afrique, ou encore la France et les Pays-Bas en Europe. Mais cette option n’est pas encore à l’ordre du jour au Cameroun. Dans le sillage des mesures gouvernementales, l’administration pénitentiaire a cependant pris des dispositions pour contenir la propagation de la maladie. Notamment la désinfection intégrale des prisons, les restrictions concernant les visites, la réduction des activités de groupe et l’isolation des cours intérieures.

Par Patricia Ngo Ngouem (Yaounde, correspondance)
Le 14/04/2020 à 12h15, mis à jour le 14/04/2020 à 13h15