Mustapha Ould Limam Chafi, célèbre opposant mauritanien réfugié au Maroc, homme très en vue sous les lambris dorés des palais présidentiels ouest-africains, ancien conseiller de Blaise Compaoré, qui aurait souvent servi de «porteur de valises» pour le paiement de rançons en vue de la libération d’otages occidentaux enlevés par les groupuscules terroristes islamistes et touaregs dans le Sahel, prévient contre de graves menaces qui pèsent sur la Mauritanie.
S’exprimant à travers un entretien-fleuve, diffusé conjointement par le site www.rmibiladi et l’hebdomadaire Le Calame de ce mercredi, il exprime une sourde inquiétude sur l'avenir de la Mauritanie en décrivant un Etat "enlisé dans une situation de lourdes menaces", ajoutant que "jamais, depuis l’indépendance, les perspectives n’ont été aussi sombres".
Dans cet entretien qui vient rompre un long silence, Mustapha Ould Limam Chafi parle sans détour de Mohamed Ould Abdel Aziz et de l’opposition à travers un diagnostic sans appel, pour dire que "la Mauritanie traverse la période la plus périlleuse de son histoire". La faute à un homme, le président Mohamed Ould Abdel Aziz. "Elle est prise en otage par un homme qui s’arroge le droit de piller ses ressources et veut soumettre son peuple à la servitude. Il a érigé la kleptomanie en mode de gestion de l’Etat. Cet homme, par ses méthodes chaotiques, ses errements aventureux, ses déclarations irresponsables et ségrégationnistes, nous mène au désastre".
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Pour Chafi, "toutes ses actions consistent à nous diviser, au risque de fragiliser la cohésion nationale et, avec elle, l’intégrité physique. Le jugement de l’histoire étant implacable envers ceux qui prétendent méconnaître les évidences, je refuse de cautionner par mon silence les dérives de ce pouvoir, irascible et pyromane».
Face à cette conduite «charretière» du pays, l'opposant mauritanien, longtemps conseiller de l'ex-président burkinabé, Blaise Compaoré, appelle à la mobilisation de tous les Mauritaniens contre «les actions dangereuses et suicidaires» de ce personnage pour sauver la nation du désastre annoncé.
Dans le contexte de la Mauritanie, on assiste à la faillite d‘un Etat «réduit aujourd’hui à une niche néo patrimoniale dont l’actuel chef crucifie les ressources et les privilèges. Nul n’est désormais à l’abri de la pauvreté, même les nantis d’hier, car les voici en concurrence avec le premier entrepreneur de Mauritanie, Mohamed Ould Abdel Aziz, à la fois chef militaire, commerçant, politicien, apprenti escroc, pas très doué d’ailleurs, comme l’atteste l’affaire Ghanagate».
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Les conséquences de cette situation: un effondrement général matérialisé par «la régression du niveau de compétences du personnel de l’administration (départements ministériels), la dégradation du mobilier, la dévaluation des symboles...», ajoute l’opposant.
Celui-ci rappelle aussi le scandale «de la ruée vers l’or à travers lequel le pouvoir a créé toutes les conditions pour pousser les citoyens vers des mirages. L’économie immatérielle de la chimère et du fantasme, mise en branle, entretenue, activée et promue pour dépouiller le peuple».
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Pour finir, Mustapha Limam Ould Chafi, se désole du comportement d’un pouvoir «qui ne semble pas familier des rudiments de la science politique, et compte uniquement sur la force prétorienne pour asseoir la paix au service de sa propre continuité, en fermant les yeux, en conscience pleine, sur les injustices sociales héritées, les discriminations et tolère l’usage de la torture».
Cet homme, qualifié parfois de «globe-trotter» et très apprécié en Afrique de l'Ouest, est sous le coup d’un mandat d’arrêt international émis par la justice mauritanienne pour collision présumé avec des groupuscules terroristes.
Mustapha Ould Limam Chafi est issu de l’ensemble tribal des «Tejekanet» de l’Assaba, précisément de la localité de Guerou (550 kilomètres à l’Est de Nouakchott), dont de nombreux éléments sont allés faire fortune en Afrique subsaharienne (Congo, Angola...). Il est présumé avoir été la tête pensante du putsch sanglant des cavaliers du changement contre le pouvoir de Maouiya Ould Sidi Ahmed Ould Taya du 8 juin 2003.