Mauritanie: l’accaparement des terres dans la Vallée du fleuve dénoncé

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Le 27/10/2016 à 17h37

L’accaparement des terres de la Vallée du fleuve Sénégal suscite des tensions entre autorités et propriétaires terriens. Outre les hommes d’affaires mauritaniens et des spéculateurs, ces terres sont convoitées par des investisseurs du Golfe. Une situation que critique l’ONG FONADH.

Désormais considérée comme «crime contre l’humanité» par la législation pénale internationale, la pratique de l’accaparement des terres continue à susciter une vive inquiétude du mouvement associatif en Mauritanie.

Une tendance illustrée par cette déclaration du Forum des organisations nationales de droits humains (FONADH-collectif d’une vingtaine d’ONG), dénonçant «l’accaparement des terres de culture dans la Vallée du fleuve Sénégal, qui continue d’empoisonner la vie de paisibles citoyens».

Une tendance dont l’explication réside dans le fait que ces terres «fertiles, font l’objet d’une convoitise immodérée de l’agro business national et international, depuis quelques années». 

A l’origine de la déclaration du jeudi 27 octobre, l’attribution de terres au niveau de l’arrondissement de Dar El Barka (environ 300 kilomètres au Sud/Est de Nouakchott). Des terres propriétés de plusieurs villages «cédées à un promoteur sans concertation». En face «des paysans et des communautés déterminés à défendre leur propriété et unique source de revenus, jusqu’au sacrifice suprême».

Le FONADH signale qu’en dépit de l’engagement répété des autorités au plus haut niveau, de trouver une solution, ce problème d’accaparement des terres persiste, dans la mesure où «des engins sont stationnés sur place et procèdent à des travaux».

Le FONADH avertit contre «une situation grosse de tension, dont il est impossible de mesurer les éventuelles conséquences».

La déclaration des ONG rappelle que «les terres de décrue du Walo ont pendant longtemps (plus d’un millénaire) fait l’objet d’un système traditionnel de gestion au Walo, au Fuuta Tooro et au Guidimakha/Gajaaga». Les expropriations des terres de culture dans la région de la vallée fleuve en Mauritanie ont pour cadre juridique une ordonnance adoptée en 1983, sous un régime militaire d’exception.

Pire, en dépit du caractère contestable des dispositions de cette loi, que le FONADH juge «scélérate», celles-ci sont allégrement violées par l’administration, notamment pour ce qui concerne les règles relatives à la publicité, exigées dans le cadre de la procédure d’attribution.

Ainsi, au fil des années, la loi adoptée sous le régime de Mohamed Khouna Ould Haidallah, a créé une pagaille inextricable.

Des terres sont accaparées par des spéculateurs bénéficiant de la complicité de l’administration, avec l’objectif de les revendre à des investisseurs plus fortunés, notamment ceux du Golfe.

Une véritable bombe à retardement face à laquelle le FONADH réclame «un moratoire de 5 ans» dans les attributions suivi d’une nouvelle réforme foncière, pour mettre de l’ordre dans le foncier agricole au niveau de la vallée du fleuve.

La pratique de l’accaparement des terres, rappelle-t-on, a été tout dernièrement élevée au rang de «crime contre l’humanité» par la législation pénale internationale.

Par Cheikh Sidya (Nouakchott, correspondance)
Le 27/10/2016 à 17h37