Vidéo. Sénégal: le carton jaune d'Amnesty International au procureur

Alioune Tine, président du Rassemblement africain des droits de l'homme, représentant d'Amnesty International en Afrique de l'Ouest

Alioune Tine, président du Rassemblement africain des droits de l'homme, représentant d'Amnesty International en Afrique de l'Ouest. DR

Le 07/08/2017 à 11h26, mis à jour le 07/08/2017 à 21h57

VidéoAu Sénégal les élections législatives du 30 juillet remportées par la coalition au pouvoir ont fait place à une vive polémique suite à la diffusion des propos d'une chanteuse jugés outrageants par le procureur. Alioune Tine d'Amnesty International dénonce une attitude qui nuit à la démocratie.

Une chanteuse, Amy Collé Dieng, a été arrêtée la semaine dernière après des poursuites lancées contre elle par le procureur de la République. Elle a tenu des propos que beaucoup jugent déplacés, mais qui, selon la société civile et selon l'opposition, ne méritent pas qu'elle aille en prison dans une démocratie comme le Sénégal. Alioune Tine, le président du Rassemblement africain pour la défense des droits de l'homme (Raddho) et à la tête d'Amnesty international pour Afrique de l'Ouest, a affirmé sur la chaîne de télévision privée 2Stv, qu'il "ne voit pas quelle faute Amy Collé Dieng a commise". 

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Amy Collé Dieng, chanteuse à succès, participait dans un groupe Whatsapp comme il en existe des centaines au Sénégal où cette messagerie est utilisée pratiquement comme un réseau social. La particularité du groupe en question, "Senegaal ak Karim" ou le "Sénégal avec Karim" est d'être dédié uniquement aux partisans de Karim Wade, candidat déclaré du PDS pour les élections présidentielles de 2019. Ce n'est donc pas ici que le présient Macky Sall se verra jeter des fleurs. 

Pour Alioune Tine, "dans un tel groupe appartenant à l'opposition et dans un contexte électoral, Macky Sall ne peut pas échapper à des attaques de toutes sortes". Il explique en outre que les termes utilisés ne méritent pas que la chanteuse s'en explique devant la justice. En fait, dans cette audio de près de 8 minutes, Amy Collé Dieng utisent des mots durs contre le chef de l'Etat qu'elle qualifie de "saï-saï", ce qui signifie "fourbe", d'après la définition qu'en donne Alioune Tine sur les ondes de Radio France Internationale (RFI). Dans un groupe Whatsapp de l'opposition, "faut-il s'attendre à ce que l'on tisse des lauriers au chef de l'Etat", se demande-t-il? Avant de conclure que ce serait "louche dans une démocratie". 

Le directeur d'Amnesty International pour l'Afrique de l'Ouest affirme qu'il faut utiliser le principe du "check and balance", c'est-à-dire "contrôler et équilibrer" aussi bien les actes du gouvernement que ceux de l'oppoistion. Par conséquent quand les partisans du chef de l'Etat sont capables de dire que leur leader est un lion, l'opposition doit être autorisée à dire qu'il s'agit d'une poule mouillée. Tine donne l'exemple d'un de ses contacts qui a écrit un poème en l'honneur du chef de l'Etat sénégalais qui y est qualifié de "mbarodi", c'est-à-dire de "courageux lion". 

Au préalable, il avait également dit que la double casquette de Macky Sall, en tant que chef de l'Etat et chef de parti, l'expose aux attaques, puisqu'il ne se pose pas en arbitre du jeu politique. Son statut n'est ni celui de la reine d'Angleterre ni celui du président autrichien, d'autant que même dans ces pays, de tels propos ne mènent son auteur devant la justice, dit-il. 

Selon lui, en tout cas, le procureur ne peut en aucun cas être le garant de l'exercice d'un bon jeu démocratique. 

Par Mar Bassine Ndiaye
Le 07/08/2017 à 11h26, mis à jour le 07/08/2017 à 21h57