Algérie: Pourquoi le général Khaled Nezzar s'est-il soudainement tu?

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Le 26/08/2019 à 12h20, mis à jour le 26/08/2019 à 12h26

Alors que le général Khaled Nezzar avait appelé l'armée à évincer le chef d'état-major Ahmed Gaïd Salah, il a subitement disparu des radars. Après un mois d'intense activité de communication inspirée de la stratégie de Donald Trump, son dernier tweet remonte à une dizaine de jours.

Après avoir défrayé la chronique en Algérie avec une série de tweets vitriolés contre Ahmed Gaïd Salah, le général Khaled Nezzar se terre désormais dans un silence assourdissant. En effet, la dernière sortie de l'ancien ministre algérien de la Défense entre 1990 et 1993, remonte au 16 août. 

Dans une ultime publication sur le réseau social Twitter, curieusement truffée de fautes -celles-ci sont ici corrigées-, il disait: "Ma dernière lettre [publiée dans le site Algérie Part, Ndlr] ne s'adresse pas aux militaires mais à Gaid Salah et puis après tout, ce n'est pas moi qui les ai embringués dans la politique! A moins que vous ne preniez sa défense et c'est là un autre problème M. le SG de l'ONM!"...

(L'ONM étant, en Algérie, l'Organisation Nationale des Moudjahidin, les "Martyrs", soit les principaux caciques du régime, ayant fait la guerre d'indépendance du pays). 

La lettre à laquelle fait référence Khaled Nezzar, nouvelle bête noire de Ahmed Gaïd Salah, est riche d'enseignements.

En effet, le général exilé y reconnaît, pour la première fois, être l'auteur des tweets acerbes publiés contre le chef d'état-major de l'Armée nationale populaire et non moins vice-ministre de la Défense du gouvernement algérien. 

"Gaid Salah, qui a accaparé la manœuvre, tente d’éliminer tous ceux qui non seulement lui font de l’ombre mais aussi [ceux] susceptibles de s’opposer à ses ambitions démesurées. Je suis un de ceux-là et n’aurait de cesse [de m'opposer] que lorsqu'il aura été mis fin à ses vils desseins", disait-il.

A la suite de quoi, Khaled Nezzar pose la question suivante: "ne vous êtes-vous pas posés la question [de savoir] pourquoi ont-ils attendu que je commence à twitter pour me traiter de conspirateur?".

Une interrogation qui sonne comme l'aveu que tout le monde attendait depuis qu'il avait commencé ses sorties à la Donald Trump. 

Dans cette lettre, justement, Khaled Nezzar rappelait le parcours peu riche de Gaid Salah, depuis la guerre de décolonisation jusqu'au moment où, lui-même, le général Nezzar, en tant que Président de la commission d'avancement et de dégagement de l'armée, avait proposé la mise à la retraite de celui qui n'était alors que commandant de brigade. 

"Malheureusement, il s’est trouvé certains mauvais conseillers auprès du Président de l’époque [Liamine Zeroual, ces faits sont antérieur à l'année 1999, Ndlr] qui s’étaient opposés à son départ et c’est ainsi qu’il fut maintenu dans l’armée. [Liamine] Zeroual l’ayant désigné commandant des forces terrestres, il se trouvait donc à la verticale d’un haut poste de commandement et les Bouteflika ont [par la suite, Ndlr] fait le reste", avait ainsi affirmé dans cette lettre Khaled Nezzar. 

Ce courrier est ainsi la toute dernière charge en date de l'ex-ministre de la Défense de l'Algérie durant la décennie noire, contre l'actuel homme fort du régime algérien, celui-là même qui a permis à Bouteflika d'obtenir un quatrième mandat et qui était le plus fervent défenseur d'un cinquième mandat. 

Rappelons enfin qu'auparavant, le 8 août dernier, Khaled Nezzar avait publié, sur YouTube, cette fois-ci, une vidéo dans laquelle il appelait l'armée algérienne à évincer le général GaÏd Salah. Cette publication avait rapidement essaimé sur la toile algérienne, et avait été reprise par plusieurs sites algériens. Mais la vidéo avait disparu très rapidement, et ce réseau social qu'est YouTube avait même été censuré durant quelques heures en Algérie.

Quoi qu'il en soit, aujourd'hui, une question se pose avec acuité, à savoir pourquoi le général Khaled Nezzar, qui serait actuellement en exil en Espagne, a décidé d'interrompre ses tweets. 

Aujourd'hui, Khaled Nezzar fait l'objet d'un mandat d'arrêt international, lancé contre lui par la justice militaire algérienne.

Il doit également faire face à des déboires avec la justice de son pays, devant laquelle il est aujourd'hui sommé de s'expliquer sur la décennie noire, celle de la guerre civile des années 90, marquée par de nombreux massacres.

Par Mar Bassine Ndiaye
Le 26/08/2019 à 12h20, mis à jour le 26/08/2019 à 12h26