Lors de la campagne électorale de décembre dernier, ayant permis au régime de l'imposer comme nouveau chef de l'Etat algérien, Abdelmadjid Tebboune avait juré de faire adopter une nouvelle Constitution, en associant l'ensemble des composantes de la nation à sa rédaction.
Ce jeudi 7 mai, "les services de la présidence de la République ont entamé la remise du projet préliminaire de la révision constitutionnelle aux personnalités nationales et académiques, partis politiques, organisations de la société civile, syndicats et organisations estudiantines, pour débat et enrichissement", affirme un communiqué émanant du palais d'El Mouradia.
Le document, dont Le360 Afrique a obtenu une copie, évoque six axes de réformes, mais se limite à énoncer des titres qui ne sont que des propositions de réflexion, sans réellement formuler d’articles.
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Ces six thèmes de réforme constitutionnelle concernent "les droits fondamentaux et libertés publiques", "le renforcement de la séparation et de l’équilibre des pouvoirs", "l’indépendance de la justice", "la Cour constitutionnelle", "Transparence, prévention et lutte contre la corruption" et "l’Autorité nationale indépendante des élections".
Ce projet reprend les annonces d’Abdelmadjid Tebboune lors de sa prestation de serment.
Par exemple, afin d’éviter le syndrome d’éternisation au pouvoir, il est proposé "une limitation du mandat présidentiel à deux successifs ou séparés". Il veut également consacrer "l’exercice des libertés de réunion et de rassemblement sur simple déclaration". Les partis politiques pourront également être librement créés sans que la loi ne puisse les interdire ou que l’administration n’entrave le droit d’en créer de nouveaux.
Néanmoins, ces déclarations d’intention ne convainquent ni la classe politique ni la société civile qui est vent debout contre la démarche ayant conduit à ces propositions.
Ainsi, Saïd Salhi, vice-président de la Ligue algérienne de défense des droits de l’Homme (LADDH) et membre de la Coordination nationale de la société civile, déclare qu’un "faux processus mène forcément à une Constitution alibi, quelle que soit la teneur du texte".
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Selon lui, "Le problème n’a jamais été le texte de la loi constitutionnelle, mais l’esprit et le processus d’élaboration, d’adoption des Constitutions qui ont toujours été jusque-là imposées au peuple et n’ont jamais été authentiques, faute de traduire la volonté réelle du peuple algérien et des consensus-compromis construits dans la société entre le peuple et l’Etat".
Pour le défenseur des droits de l’Homme, la démarche adoptée par la Présidence algérienne biaise la rédaction du texte. La "Constitution est un contrat politique, social, (...). Avant d'être le fruit du compromis entre les différentes factions et clans du système, elle doit être l’émanation de la souveraineté populaire, la traduction de sa volonté réelle et authentique", écrit-il sur sa page Facebook.
Même son de cloche chez les politiques. Ainsi, Nadia Chouitem, députée du Parti du Travail, affirme que "la Constitution doit passer par une constituante émanant du peuple".
Et au-delà de son processus de rédaction, il y a lieu de noter que le véritable problème réside dans l’application de cette loi fondamentale. En effet, l’actuelle Constitution est, certes, loin d’être parfaite, mais le problème est moins son imperfection que sa non-application.
L’implication d’Ahmed Gaïd Salah dans le processus de transition, imposant sa volonté à toute l’Algérie en foulant au pied cette même loi fondamentale, illustre le fait qu’une nouvelle Constitution ne résoudra ni le problème des libertés, ni celui de la séparation des pouvoirs et encore moins celui de l’indépendance de la Justice.
Tant que l’armée algérienne sera aux commandes faisant et défaisant les présidents, tant que les caciques s’accrocheront à leurs avantages, les constitutions se suivront sans que les véritables problèmes de l’Algérie ne soient résolus. Mais, après le passage en force de Tebboune, nul doute que le régime imposera un nouveau texte.