La RDC en «Zone rouge» en matière de liberté de presse

RD

Le 04/05/2017 à 11h10, mis à jour le 04/05/2017 à 12h33

Il ne fait pas bon être journaliste en République démocratique du Congo (RDC). Victimes de menaces et d'agressions au quotidien, souvent emprisonnés, reporters, chroniqueurs et éditorialistes attendent l'adoption par le Parlement de la loi sur la dépénalisation du délit de presse.

Journalistes, acteurs politiques (ministres, députés et sénateurs) et activistes de la société civile ont pris part à la célébration, ce mercredi 3 mai 2017, de la journée mondiale de la liberté de la presse organisée au Centre des ressources des médias à Kinshasa, capitale de la RD Congo.

Initiée par l’Union nationale de la presse du Congo (UNPC) et Journaliste en danger (JED), une organisation non gouvernementale de défense des journalistes, en partenariat avec le bureau local de l’UNESCO, cette session a permis aux hommes de presse de demander au président de la République, Joseph Kabila, d'ordonner la libération des personnes arrêtées pour des motifs liés à la liberté de la presse.

Dressant un bilan sombre de la question en RDC - pays classé 154e sur 180 en matière de liberté de la presse - JED révèle les données suivantes:

- 21 journalistes interpellés ou arrêtés;

- 20 cas de journalistes menacés ou agressés ;

- Au moins 26 cas de censure ou de fermeture des médias ;

- 1 journaliste tué à Mbuji-Mayi (Centre de la RDC) dans des circonstances qui n’ont pas encore été élucidées ;

- Dans le Kasaï central, où un média a été incendié par des miliciens, au moins trois autres journalistes ont été contraints d’abandonner leurs domiciles, pour fuir les violences et les menaces qu’ils ont reçues aussi bien de la part des miliciens que des forces sécurité qui s’affrontent.

«Ici à Kinshasa, au moment où est célébrée cette journée dédiée à la liberté de la presse, un journaliste croupit à la prison centrale de Makala depuis 4 mois sans aucun jugement le condamnant. A cela, il faut ajouter que le signal de RFI reste brouillé à Kinshasa et que des médias appartenant aux leaders de l’opposition sont fermés depuis plusieurs mois, sinon quelques années à Lubumbashi», a déclaré Tshivis Tshivuadi, secrétaire général de JED.

«Alors que l’actuel président de la République doit quitter le pouvoir à la fin de cette année, au terme de son deuxième et dernier mandat expiré en décembre 2016, mais prolongé par un Accord politique signé le 31 décembre 2016, dit «Accords de la Saint-Sylvestre», il laisse derrière lui une presse exsangue, des médias sinistrés et des journalistes livrés à eux-mêmes et à la violence d’Etat», a regretté Tshivis Tshivuadi.

D’ores et déjà, les différentes associations ont affirmé, haut et fort devant les politiques devant les politiques, attendre du Parlement l'adoption de la loi sur la dépénalisation du délit de presse, celle du budget sur l'aide à la presse, mais aussi la loi sur l'accès à l'information.

Somme toute, les journalistes ont lancé un appel urgent à la classe politique pour une décrispation du climat politique tendu dans lequel ils travaillent depuis que le pays s’est installé dans une crise politique profonde. Cette décrispation passe, selon eux, par la mise en œuvre des recommandations de l’Accord politique du 31 décembre appelant le ministre en charge des médias de rétablir, dans les 15 jours, le signal des médias audiovisuels fermés ou interdits…

En attendant, JED classe le pays "Zone rouge" en matière de liberté de la presse. 

Par Tshieke Bukasa (Kinshasa, correspondance)
Le 04/05/2017 à 11h10, mis à jour le 04/05/2017 à 12h33