Le dernier «Rapport de suivi de la situation économique: redresser l’économie algérienne après la pandémie» de la Banque mondiale sur le pays pétrolier d'Afrique du Nord continue de susciter de très vives réactions en Algérie. Si le gouvernement du Premier ministre et argentier algérien s’est muré dans le silence, il a tout de même laissé à l’APS et à certains économistes du régime le soin de tirer à boulets rouges sur le rapport de l’institution de Breton Woods.
Pis, ceux-ci sont allés jusqu’à insinuer qu'un «voisin de l’Ouest» serait derrière ce rapport qui ne dit pourtant rien d’autre que l’Algérie est un pays rentier et que l’évolution des indicateurs macroéconomiques est rythmé par celle des cours des hydrocarbures.
En clair, le pays demeure dépendant de la rente pétrolière et de l’évolution du cours de l’or noir. Et de fait, les hydrocarbures représentent 95% des recettes d’exportation et plus de 55% des ressources budgétaires.
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Outre le fait de signaler que les améliorations des indicateurs de l’économie algérienne (croissance du PIB, déficit budgétaire, déficit du compte courant…) sont conjoncturelles et qu’il y a des risque de retournement de situation en cas d’évolution défavorable des cours des hydrocarbures, un autre point soulève la polémique en Algérie. Il s’agit du niveau des importations avancé par la Banque mondiale et qui, non seulement, contredit fortement celui annoncé par les autorités, mais remet en cause le prétendu excédent commercial mis en avant par les autorités algériennes.
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Selon l'institution, les importations devraient atteindre la barre des 50 milliards de dollars à fin 2021. Un niveau très élevé par rapport aux données officielles et qui viendrait ainsi contredire l’une des «grandes avancées» du gouvernement algérien au niveau des échanges extérieurs avec un excédent commercial, une première depuis 2014, dans le sillage de la flambée du cours du baril de pétrole qui avait franchi à cette date la barre des 140 dollars.
Un niveau qui met à nu l’excédent commercial annoncé par le Premier ministre et ministre des Finances algérien Aïmene Benabderrahmane. Il faut reconnaître que l’écart entre les deux projections est énorme, se chiffrant à environ 20 milliards de dollars, sachant que les importations devraient se situer à 30,4 milliards de dollars, selon les projections des autorités.
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Mais qu’en est-il en réalité? D’abord, il faut souligner que malgré les interdictions d’importations et la falsification des chiffres, ramener la facture des importations à seulement 30,4 milliards de dollars est quasiment impossible. D’ailleurs, au terme du premier semestre 2021, le montant des importations de marchandises avait atteint 2.464 milliards de dinars, soit environ 19 milliards de dollars, à cette date, en hausse de 15,70% par rapport à la même période de l’année dernière. Durant le second semestre, la facture des importations ne devrait donc pas dépasser 11,4 milliards de dollars, si l'on ne veut pas dépasser le chiffre projeté. Ce qui est très peu probable, pour ne pas dire impossible à réaliser quand on sait qu’à fin septembre 2021, selon les données officielles, les importations de marchandises avaient déjà atteint les 28 milliards de dollars.
C’est dire que pour réaliser l’objectif du Premier ministre, l’Algérie doit importer seulement 3,4 milliards de dollars durant le dernier trimestre de l’année, contre une moyenne trimestrielle de 9,33 milliards depuis le début de l’année.
Si on reste simplement sur la même tendance que durant les trois premiers trimestres, les importations de biens d'octobre à fin décembre devraient donc se situer autour de 10 milliards de dollars. D’autant qu’en octobre dernier, le président Abdelmadjid Tebboune avait demandé au gouvernement de faire face à la flambée des prix et aux pénuries, «même s’il faut recourir à l’importation, à titre urgent et exceptionnel, pour préserver le pouvoir d’achat et inonder le marché des produits objet de spéculation», assouplissant la politique des interdictions d'importations durant le dernier trimestre.
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Et en conséquence, la facture 2021 des importations de marchandises devrait s’approcher des 40 milliards de dollars. Ce qui paraît logique quand on sait qu’en 2020, malgré la récession et les limitations des importations de biens à cause de la pandémie du Covid-19, cette facture avait atteint 34,4 milliards de dollars.
Ensuite, sachant que la balance commerciale prend en compte la différence entre exportations et importations de biens et services, il est fort probable que les autorités algériennes aient volontairement occulté la valeur des importations des services. Or, celles-ci sont importantes. En 2019, la facture de cette seule catégorie s’élevait à 10 milliards de dollars.
En tenant compte de cette facture des services et de celle, réelle, des importations à fin décembre 2021, on devrait se rapprocher du montant des 50 milliards de dollars avancé par la Banque mondiale comme facture 2021 des importations algériennes en biens et services. Alors, la balance commerciale algérienne resterait déficitaire, contrairement à ce qui est avancé par l'argentier du pays.
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C’est ce que souligne d’ailleurs l’expert financier algérien Lies Kerrar dans un tweet, précisant que ce chiffre avancé par la Banque mondiale est loin d’être farfelu comme l’annonce la voix du gouvernement. L’APS a en effet avancé que «l’Algérie n’arrivera jamais et en aucun cas» à cette facture pour les importations.
Ce chiffre des importations illustre donc l’échec des politiques d’interdictions d’importation de biens et services des gouvernements qui se sont succédé à la tête du pays depuis 2016. Pis, cette politique contribue à freiner la relance de l’économie algérienne dépendante des équipements et intrants pour produire des biens.
Malheureusement, les dirigeants ont une autre vision. «La réduction des importations est une autre préoccupation sur laquelle l’exécutif a tenté d’agir pour endiguer les achats superflus de l’étranger, d’une part, et de rationaliser, autant que faire se peut, les approvisionnements tant pour la consommation des ménages que pour l’outil de production, d’autre part», a expliqué le Premier ministre et ministre des Finances Aïmene Benabderrahmane.
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En clair, selon le chef du gouvernement algérien, les voitures, les médicaments, les équipements pour la production… sont donc des importations superflues.
Ainsi, outre la privation des Algériens des moyens de locomotion, de médicaments pour se soigner, et d’autres biens, ces interdictions bloquent de nombreux projets et unités de production avec un impact négatif sur la diversification et le développement économique du pays, maintenant l’Algérie dans le statut d’un pays totalement dépendant des hydrocarbures. C’est le sens de ce nouveau rapport de la Banque mondiale qui appelle Alger à une diversification de son économie et à sortir du tout pétrole.
Pourtant, en novembre dernier, le Fonds monétaire international (FMI) avait aussi souligner que «l’économie algérienne devrait se rétablir en 2021 et 2022, mais les perspectives demeurent incertaines et difficiles», sans toutefois soulever des vagues.