«Nous voulons d’abord sauver nos peaux. Nous voulons évacuer nos compatriotes ivoiriens et africains (…). Nous avons besoin de l’aide du monde en ce moment pour évacuer les étrangers, le plus rapidement possible parce que la situation est très critique», souligne Bamory Ibrahim Traoré, étudiant ivoirien et président des Ivoiriens de Kiev, sur Africa Radio. Il explique qu’«il y a plusieurs Etats africains qui n’ont pas de relations diplomatiques avec l’Ukraine, donc nous n’avons pas d’ambassade ici. En tant président des Ivoiriens en Ukraine, nous sommes rentrés en contact avec nos autorités de tutelle et nous sommes également en contact avec nos responsables d’universités qui nous conseillent de rester à l’abris et de garder nos documents avec nous».
Le cas de Bamory n’est pas isolé. Ils sont plus de 75.000 étudiants étrangers en Ukraine, selon les données de 2019. De différentes nationalités certes, ils sont majoritairement venus du continent africain et sont actuellement pris au piège par la guerre. Nombre d’entre eux cherchent à fuir les bombardements russes en essayant de rejoindre les pays limitrophes. Un véritable parcours de combattant du fait qu’il faut d’abord quitter des zones de guerre à l’intérieur de l’Ukraine pour rejoindre un des quatre pays frontaliers: Pologne, Slovaquie, Hongrie et Roumanie.
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Face à cette situation, de nombreux pays ont annoncé des plans d’évacuation de leurs ressortissants. C’est le cas du Maroc qui compte plus de 12.000 ressortissants en Ukraine dont plus de 8.000 étudiants, soit la seconde plus grande communauté estudiantine étrangère en Ukraine, derrière l’Inde (plus de 14.000 étudiants). Si 3.000 d’entre eux ont regagné le Royaume récemment, grâce à des vols spéciaux, la majorité est restée sur place. Royal Air Maroc (RAM) a annoncé, dimanche 27 février, avoir programmé des vols à tarifs exceptionnels au départ des pays limitrophes de l’Ukraine, pour les Marocains établis dans ce pays qui souhaitent être évacués. La compagnie a programmé 3 vols à partir du mercredi 2 mars au départ de Bucarest (Roumanie), Budapest (Hongrie) et Varsovie (Pologne) à destination de Casablanca au tarif de 750 dirhams TTC.
Dans ce cadre, le ministre mauritanien des Affaires étrangères, Ismaïl ould Cheikh Ahmed, a souligné avoir eu des contacts téléphoniques avec son homologue marocain, Nasser Bourita, et il a été convenu que les étudiants mauritaniens établis en Ukraine pourront embarquer à bord des vols spéciaux de la RAM.
La Tunisie aussi a annoncé la mobilisation de ses avions pour rapatrier ses ressortissants qui souhaitent rentrer, parmi les 1.700 Tunisiens vivant en Ukraine. A ce titre, les diplomates des ambassades à Varsovie et Bucarest ont été renforcés et des équipes ont été envoyées aux postes frontières de la Pologne et de la Roumanie.
De même, la Libye a annoncé des évacuations de ses ressortissants, estimés à 3.000, via la Slovaquie.
D’autres pays comme le Nigéria, le Ghana et l’Afrique du Sud se préparent également pour évacuer leurs ressortissants qui arrivent à franchir les frontières de l’Ukraine avant que la situation ne s’envenime encore plus.
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Malheureusement, de nombreux Africains, pour la plupart étudiants, qui tentent de fuir l’invasion russe en rejoignant les pays voisins, ont du mal à quitter l’Ukraine. La police et le personnel de sécurité ukrainiens refusent de laisser les Africains monter dans les bus et les trains évacuant les Ukrainiens vers la Pologne, selon de nombreux témoignages et vidéos postés sur les réseaux sociaux. Aux abords des gares ferroviaires, des milliers d’étudiants non-européens, dont de nombreux africains ont été bloqués. Seuls les Ukrainiens étaient autorisés à monter à bord des trains, puis les autres étrangers. Les étudiants, à majorité africains, étaient laissés à quai, comme en attestent les nombreux tweets. Une situation qui a fait réagir le Nigéria qui compte plus de 4.000 étudiants sur le sol ukrainien.
«Il y a eu des informations regrettables selon lesquelles la police ukrainienne et le personnel de sécurité refusent de laisser les Nigérians monter dans les bus et les trains», pour la Pologne, a déclaré Garba Shehu, porte-parole de la présidence nigériane, ajoutant que «dans une vidéo largement partagée sur les réseaux sociaux, une mère nigériane avec son bébé a été filmée en train d’être forcée physiquement de céder son siège à une autre personne».
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Malheureusement, même ceux fuyant la guerre et qui arrivent à atteindre les frontières des pays limitrophes font face à des pratiques discriminatoires. Les Africains qui arrivent à quitter l’Ukraine sont en effet bloqués aux frontières des pays limitrophes. Ainsi, des fonctionnaires polonais leur ont refusé l’entrée en Pologne.
Outre les Nigérians, un groupe de Sud-africains, majoritairement des étudiants, est resté coincé entre l’Ukraine et la Pologne, a souligné le porte-parole du ministère sud-africain des Affaires étrangères, Clayson Monyela. Les autorités sud-africaines ont dépêché leur ambassadeur pour aider leurs compatriotes à franchir la frontière polonaise. L’ambassadeur sud-africain a déclaré que les Africains y étaient victimes de «mauvais traitements».
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Une situation qui suscite l’ire des Africains. «Désormais, la Pologne accueille les Ukrainiens avec leurs animaux, mais elle refuse toujours les étudiants africains bloqués en Ukraine de traverser sa frontière. Cette décision est raciste et inhumaine. Bizarrement, les médias n’en parlent pas», a tweeté Touré Gueladjo.
Toutefois, face au tollé que cette discrimination a suscité, les autorités polonaises ont fini par ouvrir leurs frontières à tous ceux qui veulent fuir l’Ukraine, à grand coup de publicité. Les ressortissants nigérians admis par la Pologne ont un délai de 15 jours pour rejoindre leur pays.
Russie-Ukraine: inquiétude sur le sort des milliers d’étudiants africains pris entre la guerre et les discriminations (258403)